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sentimens d’affectueuse sympathie qui unissaient le jeune capitaine de dragons au lieutenant-général-gouverneur, malgré la différence d’âge et de situation.

En septembre, la petite ville de Sault, qui commande au pied du Ventoux d’importans défilés, ouvrant un double accès vers le Bas-Dauphiné et la Haute-Provence, est mise en état de défense sous la direction de Châteauneuf-Saporte. Au 20 septembre, nouvel ordre. On vient d’apprendre la retraite du duc de Savoie, et M. de Saporta reçoit l’avis, par Anfossy, de se rendre à Aix, d’où, quatre jours après, il est envoyé « pour commander dans l’étendue du golfe de la Napoule, » en prévision de l’apparition de la flotte ennemie. Mais, dès le 27 septembre, il est averti par le comte de Grignan que, si la flotte n’a pas paru, il peut revenir à Aix. C’était la fin de la campagne, et le journal de Dangeau nous apprend effectivement qu’à cette date, don Pedro Corbet, commandant les vaisseaux d’Espagne, stationnés à Gênes, sur le refus des Génois de fournir des quartiers d’hiver pour vingt mille hommes et de déclarer la guerre à la France, avait dû finalement se retirer. Il nous apprend aussi que le comte d’Estrées, avec l’escadre française, était arrivé aux îles d’Hyères, et qu’enfin le roi avait accordé 12,000 livres de gratification au comte de Grignan, « qui avait très bien servi cette année. » Quant au commandant des milices, par une disposition de l’ordre du 6 septembre, ses appointemens avaient été fixés à 100 livres par mois. Il faut bien reconnaître que le pays était alors servi avec autant d’activité que d’économie, et que le succès même ne faisait pas défaut à tant d’efforts. M. de Saporta garda le commandement du golfe de la Napoule[1] au moins jusque dans l’été de 1693, puisqu’à la date du 21 juin M. de Grignan lui mande d’Aix son départ pour Digne, ou il va rejoindre le duc de Vendôme, et qu’arrivé à Digne, il l’avertit le 30 juin qu’il a donné des ordres à Antibes « pour en tirer des canons et des munitions qui doivent être portés à Colmars, Guillaumes et Entrevaux. » Il ne faut pas oublier que le duc de Vendôme était gouverneur titulaire de Provence, où il résidait peu, il est vrai. L’armement de la frontière coïncidait ici avec l’entrée en Piémont de Catinat

  1. Il devait y être encore en juin 1695, époque où nous savons, par une lettre de Mme de Sévigné à M. de Coulanges, que M. de Grignan était allé faire une tournée vers les côtes.