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et la cavalerie dans l’intervalle, marchèrent à lui d’une si belle allure qu’il n’attendit pas leur approche, et, suivi à coups de canon, rentra prudemment dans la montagne.

Le 14, une division de 5,000 hommes, composée en grande partie des troupes de Douera et de Boufarik, partit de ce dernier camp, sous le commandement du général Rullière, pour ravitailler Blida et le camp supérieur. Telle était la vigilance des Kabyles, qui, avec l’assistance d’un bataillon d’askers, en faisaient étroitement le blocus, que ces deux postes si rapprochés ne pouvaient même plus communiquer entre eux. A 4 kilomètres de Blida, au-delà de Méred, la division aperçut sur sa gauche les réguliers formés en bataille et la cavalerie arabe prête à fondre sur l’arrière-garde. Une double charge des chasseurs d’Afrique, conduite par le colonel de Bourjoly d’un côté, par le commandant Bouscaren de l’autre, prévint la double attaque et dégagea, la mitraille aidant, les abords du camp supérieur. Depuis trois jours, on y criait la soif, les Kabyles ayant obstrué la rigole qui l’alimentait. Le lendemain, le convoi fut conduit à Blida, sous la protection du 2e léger, dont les tirailleurs, embusqués sur la berge de l’Oued-Kébir, tenaient l’ennemi à distance. Quand la colonne reprit le chemin de Boufarik, réguliers et cavaliers essayèrent d’un retour offensif qui ne réussit pas mieux que leur tentative de la veille. Dans ces petites affaires, la division française eut dix hommes tués et quatre-vingts blessés, dont cinq officiers. Ce fut la dernière opération menée par le général Rullière, qui, n’étant pas toujours d’accord avec le maréchal Valée, demanda son rappel en France.

Dans le même temps, les généraux de Rostolan et de Dampierre s’occupaient de ravitailler, l’un Koléa, l’autre les camps de l’Arba, de Kara-Moustafa et du Fondouk. L’état des affaires, à l’orient de la plaine, n’était pas brillant: Ben-Salem y régnait en maître et partageait justement, avec Sidi-Mbarek, la confiance d’Abd-el-Kader.

Aussitôt après le départ de la colonne, qui, le 14 et le 15 décembre, venait de débloquer, pour un moment, Blida et le camp supérieur, Sidi-Mbarek avait repris et resserré plus étroitement le blocus; il lui était arrivé de Médéa un canon et un obusier qu’il mit en batterie contre la ville ; mais ce n’était pas le feu de cette artillerie mal servie qui inquiétait la garnison, c’était le manque d’eau. Maîtres du cours supérieur de l’Oued-Kébir, les Kabyles espéraient réduire leurs adversaires par la soif. Il y avait dans Blida des citernes, et, pendant un temps donné, la garnison pouvait se passer du terrent; mais, au camp supérieur, le 24e n’avait pas cette ressource. Deux fois, le colonel Changarnier, venu de Boufarik, réussit à déblayer la rigole du camp; lui parti, le barrage était aussitôt refait par les Kabyles. Averti de la détresse du 24e,