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assoupis et peut-être toujours prêts de se réveiller. Il y a pour le moment plus de bruits vagues ou d’apparences douteuses que d’événemens réels et décisifs. Les entrevues impériales qui se renouvellent toujours à cette époque, ces entrevues elles-mêmes prennent cette année une physionomie placide. L’empereur d’Autriche vient de faire encore une fois sa visite au vieil empereur d’Allemagne à Gastein : les deux souverains n’ont pas même mis leur uniforme. Ils n’étaient pas suivis de leurs chanceliers ; M. de Bismarck attend l’heure d’aller à Kissingen, M. de Kalnoky est à Vienne. La nouvelle entrevue de Gastein a visiblement le caractère d’un acte traditionnel de déférence et de courtoisie de la part de l’empereur François-Joseph, bien plus que d’une de ces réunions où se préparent et se décident les grandes combinaisons. Les deux empereurs paraissent s’être rencontrés pour se complimenter sur le maintien de la paix, pour attester une fois de plus l’intégrité de l’alliance qui unit les deux empires. Sur quoi, en réalité, auraient-ils pu se concerter ? Les affaires de l’Europe ne semblent pas, pour le moment, se prêter à une délibération bien précise. C’est tout au plus si on s’intéresse encore à cette étrange partie engagée entre les Bulgares multipliant les démarches pour attirer à Sofia le nouveau prince qu’ils ont élu, et le prince Ferdinand de Cobourg qui voudrait bien répondre à l’appel, mais ne l’ose de peur de se jeter dans une aventure. On commence à se fatiguer de ces affaires bulgares. Il reste toujours, il est vrai, la question égyptienne, qui est fort loin d’être réglée, qui est moins résolue que jamais depuis que le sultan a refusé de ratifier la convention que l’Angleterre a cru pouvoir lui proposer ; mais cette question elle-même, elle « sommeille, » selon le mot de sir Henry Drummond Wolf, qui, interrogé tout récemment, a donné quelques explications assez peu claires, assez peu décisives, en se plaignant un peu de la France. Lord Salisbury, pour sa part, à en juger par un discours qu’il a prononcé dernièrement à Nerwich, ne semble pas pressé de reprendre la question et de s’engager. Notre ministre des affaires étrangères, de son côté, a cru devoir adresser à tous les agens français une circulaire où, en rectifiant tous les faux bruits sur la conduite de notre diplomatie, en précisant les vices ou les faiblesses de la convention anglo-turque, il témoigne la meilleure intention de rechercher a une solution à laquelle l’Europe est intéressée, mais qui touche particulièrement la France et l’Angleterre… » En réalité, il n’y a qu’une convention de moins et la probabilité d’une négociation nouvelle en perspective.

Si les événemens semblent aujourd’hui se ralentir quelque peu avant de reprendre leur cours, s’il y a une sorte de trêve convenue, momentanée, qui durera d’ailleurs ce qu’elle pourra et n’est jamais à l’abri de l’imprévu, la mort, quant à elle, ne connaît pas de vacances ; elle frappe indistinctement au midi et au nord, parmi les hommes qui ont