Page:Revue des Deux Mondes - 1888 - tome 85.djvu/878

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

maintenant d’une plus grande protection, dans l’intérêt de la santé et des mœurs, ainsi que de la vie de famille, pour ne pas être épuisé par le travail du dimanche, le travail de nuit et le travail exagéré pendant les jours de la semaine. Pour les hommes, nous aspirons, dans la mesure du possible, à la suppression du travail du dimanche et à la limitation du travail pendant les jours ouvrables à dix heures, que nous estimons désirables dans l’intérêt de toutes les parties, par le libre accord entre les patrons et les ouvriers. »

Loin de poursuivre une transformation radicale des conditions de la production, comme la veulent les démocrates socialistes, l’union des associations professionnelles se borne à proposer des solutions possibles dans la pratique. Minorité d’élite dans le mouvement ouvrier, elle réclame l’autorisation légale pour le groupement des sociétés d’une même profession. Les caisses de secours locales de l’union ont été autorisées par la loi sur l’assurance des ouvriers contre la maladie. Les corporations libres du Verband ne jouissent pas encore de la qualité de personnes civiles. Une pétition soumise au Reichstag à cet effet n’a pas encore abouti. En attendant, plusieurs sections s’occupent activement de l’amélioration des logemens, de l’organisation des sociétés coopératives de production et de consommation, sans intervention de l’état, sans réclamer de privilège d’aucune sorte, demandant seulement une liberté d’action complète. Parmi les travaux d’utilité générale de l’union, il faut signaler une statistique des salaires relevée dans un millier de communes. Le gain d’un homme par semaine, d’après cette statistique, descend, dans certains cantons de l’Allemagne, au-dessous de 7 marks, avec douze à quatorze heures de travail quotidien.

Jusqu’à présent, les associations des Gewerkvereine n’ont pas organisé de grèves, comme les trade-unions anglaises, peut-être à cause du nombre moins puissant de leurs membres. On leur a reproché leur origine politique, à cause de l’intervention du parti progressiste de la chambre des députés de Prusse dans leur organisation. Plus d’une fois, on les a entendu désigner comme l’école de recrutement ou le dépôt de réserve pour les combattans de l’état communiste de l’avenir. Ces accusations et ces reproches manquent de fondement. Que la politique ait été pour quelque chose dans la création des associations professionnelles, cela ne fait point de doute. Mais le but même de l’œuvre n’est pas un but politique. La politique entre pour une bien plus forte part dans l’institution des assurances ouvrières suscitée par le prince de Bismarck, et par les socialistes d’état du parti conservateur. C’est une raison politique qui a engagé, dès le siècle précédent, Frédéric le Grand à se déclarer