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en cas de passage de troupes. Le recensement du bétail et la statistique agricole font partie du plan de mobilisation. Quand le prince de Bismarck occupe au parlement son siège de chancelier de l’empire, c’est en uniforme de général. Le manuel d’administration et d’éducation, médité par les fonctionnaires publics à tous les degrés, s’intitule : Die Mannszucht, tandis que le catéchisme de la nation devient : Das Volk in Waffen. Être prêtes à tout moment à entrer en campagne, au premier appel du roi de Prusse, devenu empereur, tel est l’objet, tel est le résultat de la constitution politique des populations de l’Allemagne unifiée.

Dès avant la constitution définitive de l’empire, la Prusse a imposé, lors de la conférence tenue à Stuttgart, le 5 février 1867, aux états de l’Allemagne du sud, comme condition de leur entrée dans une alliance offensive et défensive avec la confédération du Nord, l’organisation de leurs forces militaires sur son propre modèle. Jusqu’alors, la monarchie prussienne, afin d’assurer sa prépondérance, avait retenu sous les armes 3 pour 100 de sa population totale, entretenant ainsi une armée à peu près égale en nombre à celle de la France. Ce déploiement de forces, réalisé au prix de sacrifices énormes, était indispensable pour un état aspirant au rang de grande puissance, et qui ne voulait pas se résigner à jouer le rôle de la Bavière ou de la Saxe, à se laisser dicter sa politique allemande par Lippe-Detmold ou Lichtenstein, deux principautés minuscules siégeant à la diète au même titre que lui. Moins belliqueux, moins expansifs que la Prusse, les états secondaires entretenaient moins de soldats en proportion de leur population. Avant les traités d’où sortit la confédération de l’Allemagne du nord, le royaume de Wurtemberg comptait seulement 10,000 hommes armés sur le pied de paix, le grand-duché de Bade 8,000, soit la moitié des effectifs actuels. Encore ces chiffres ne figuraient-ils guère que sur le papier, tandis que maintenant la constitution de l’empire oblige au service militaire tous les hommes valides, fixant à 1 pour 100 de la population totale l’effectif de présence sous les drapeaux, avec trois années de service actif, quatre années dans la réserve, cinq années dans la landwehr du premier ban. Sur 100 habitans, 3 figurent ainsi sur les cadres de l’armée pour être mobilisés au premier appel, sans compter les effectifs du second ban de la landwehr et de la levée en masse des hommes valides âgés de dix-sept à quarante-cinq ans, qui forment le landsturm en cas d’invasion du territoire national.

D’après la constitution de l’empire, le droit de souveraineté des états particuliers de l’Allemagne se réduit pour les princes confédérés à requérir les troupes en garnison sur leur territoire pour