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— Peut-être oui, peut-être non.

— Moi, je crois qu’il est vivant, et je vous envoie le chercher.

— Chercher Livingstone? Mais... C’est aller au cœur de l’Afrique.

— Possible. J’entends que vous le retrouviez,.. où qu’il soit, et que vous m’en rapportiez des nouvelles. Ah !.. il se peut qu’il soit à court. Vous prendrez avec vous de quoi le ravitailler de tout. Arrangez-vous, mais retrouvez Livingstone.

— Avez-vous réfléchi à ce que cela pourra coûter?

— Combien ?

— Burton et Speke ont dépensé entre 75,000 et 125,000 francs, et je crois bien qu’il faut calculer sur 65,000 au moins.

— Très bien! Prenez 25,000 francs; quand ils seront dépensés, prenez-en 25,000 de plus, puis encore et encore, mais retrouvez Livingstone.

Et Livingstone fut retrouvé, secouru par le reporter du New-York Herald, qui devint l’un des explorateurs les plus en vue du continent noir. Et le jour même où le New-York Herald annonçait la grande nouvelle au monde, M. Stanley avisait M. Bennett qu’il s’était engagé d’honneur à faire tenir à la famille de Livingstone les lettres ouvertes que l’illustre voyageur lui avait confiées pour être remises à sa famille aussitôt la publication du New-York Herald.

— Télégraphiez-les par le câble.

— Cela coûtera 50,000 francs !

— Qu’importe ! Nous aurons tenu la parole donnée par vous à Livingstone.

Le fondateur du New-York Herald mourut le l juin 1872, laissant une fortune énorme et un journal dont son fils a encore accru la réputation. Stanley lui demandant un jour s’il était vrai, comme le bruit en courait, qu’il eût l’intention de vendre son journal, il lui répondait :

— Ceux qui le disent se trompent. Il n’y a pas assez d’argent dans New-York pour payer le Herald.


VI.

Si nous nous sommes attaché de préférence à retracer la carrière de M. G. Bennett, c’est qu’il est, dans ce domaine, ce que les Américains appellent un representative man. Il fut le premier à tracer la voie, le plus hardi, et devint le plus riche; mais il n’est pas le seul, il s’en faut de beaucoup, auquel son journal ait rapporté une grande fortune. L’éditeur du New-York Times a refusé