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Tel est le récit fait par M. S... Il n’apprit la mort de son ami L... que le lendemain dimanche, à trois heures de l’après-midi.

L... était mort le samedi soir, vers neuf heures moins dix minutes, sans que l’heure puisse être affirmée avec plus de précision, puisque le frère de L... était resté avec lui de huit heures à huit heures quarante, et qu’à neuf heures Mme L..., revenant dans la chambre de son mari, le trouva mort, d’une rupture de l’aorte, d’après le diagnostic du médecin.

Ce cas est intéressant à bien des titres. La véracité de M. S... est certaine. Jamais M. S... N’a eu d’autre hallucination ou d’autre pressentiment, et rien, assurément, ne pouvait lui faire prévoir la mort de son ami.


Voici un autre récit, qui présente le caractère intéressant d’être un événement historique, et de remonter à une époque où il ne pouvait être question ni de suggestion mentale ni d’action à distance. C’est le récit fait par Agrippa d’Aubigné au moment de la mort du cardinal de Lorraine :

« Le roi estant en Avignon, le 23 décembre 1574, y mourut Charles, cardinal de Lorraine. La reine (Catherine de Médicis) s’estait mise au lit de meilleure heure que de coustume, aiant à son coucher entr’autres personnes de marque le roi de Navarre, l’archevêque de Lyon, les dames de Retz, de Lignerolles et de Saunes, deux desquelles ont confirmé ce discours. Comme elle estoit pressée de donner le bon soir, elle se jetta d’un tressant sur son chevet; mit les mains au-devant de son visage et avec un cri violent appela à son secours ceux qui l’assistoient, leur voulant monstrer au pied du lit le cardinal qui lui tendait la main. Elle s’escriant plusieurs fois : « Monsieur le cardinal, je n’ai que faire avec vous. » Le roi de Navarre envoie au mesme temps un de ses gentils hommes au logis du cardinal, qui rapporta comment il avoit expiré au mesme point. »


Récemment, en feuilletant un livre fort curieux, datant de 1578, les Histoires prodigieuses, je trouve le récit suivant dû à François de Belleforest, Commingeois. (On sait que ce François de Belleforest a été un littérateur et un historien tout à fait remarquable.) Il a échappé aux recherches de MM. Gurney et Myers, et j’ai eu une vraie joie en faisant cette découverte.

« On lit, en divers exemples, que les amis morts loing de leurs affectionnés sont venus leur dire à Dieu sortans de ce monde ; ce que je peux dire comme tesmoing oculaire, qui en ai eu et vu l’expérience, non couché, ni en sommeillant, ains (mais) estant debout