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On jeta son corps dans un trou et on accumula dessus un grand tas de pierres. Un autre monument à la porte de Jérusalem, dans la vallée da Cédron, porta longtemps le nom d’Absalom, Plusieurs années avant sa mort, comme il n’avait pas d’enfans, il voulut avoir un cippe pour perpétuer son nom, près de la ville où il avait vécu, et il se fit de son vivant un iad, qui exista longtemps après sa mort.

Pour la vingtième fois, David fut désolé d’une mort dont il profitait, et les récits furent arrangés de façon à ce qu’il n’en fût pas responsable. Toute l’armée défila devant le vieux roi, assis au milieu de la porte de Mahanaïm, et la royauté d’Israël fut sauvée ; ajoutons : la destinée d’Israël ; en effet, si le règne du fondateur de Jérusalem eût uni d’une aussi triste manière, David n’eût pas été le personnage légendaire qu’il est devenu, et, d’un autre côté, Iahvé n’eût pas été le dieu fidèle envers ses fidèles, le dieu entre tous qu’il vaut le mieux servir, car il est un dieu sûr.

Quand Ahitofel et les rebelles maîtres de Jérusalem apprirent la victoire de David, ils se débandèrent. Ahitofel revint à Gilo, mit ordre à ses affaires, s’étrangla et fut enterré dans le tombeau de ses pères. L’ensemble des tribus, ce qu’on appelait Israël, ne s’obstina pas dans la révolte. La tribu de Juda, qui était la plus coupable, fut plus difficile à ramener. Ce fut l’œuvre des prêtres Sadok et Abiathar. Amasa fut maintenu dans son commandement militaire. La politique de David sembla quelque temps réserver ses faveurs pour ceux qui l’avaient trahi ; il était sûr des autres. Cela causa plus d’un mécontentement. La masse de la tribu de Juda accourut au-devant de l’armée royale, quand elle repassa le Jourdain, à Galgal. Sémeï de Bahourim vint avec mille Benjaminites demander grâce ; tous furent pardonnés.

Le cas de Meribaal était embarrassant. Ce malheureux vint de Jérusalem trouver le vainqueur, affectant de n’avoir ni fait sa barbe, ni nettoyé ses habits depuis le départ du roi. Siba, cependant, continuait à le charger. David hésitait. Il partagea les biens de Saül entre Meribaal et Siba. Meribaal n’accepta pas cette solution injurieuse. On ne sait ce qu’il devint. Il ne paraît pas, en tout cas, avoir retrouvé les faveurs que David lui avait accordées.

Barzillaï le Galaadite était aussi descendu de Roglim, et vint passer le Jourdain avec le roi, pour l’accompagner jusqu’à l’autre bord. C’était lui qui avait fourni des provisions au roi pendant son séjour à Mahanaïm. Et le roi dit à Barzillaï : « viens avec moi de l’autre côté du Jourdain ; je pourvoirai à tes besoins chez moi, à Jérusalem. » Mais Barzillaï répondit : « Combien d’années ai-je donc encore à vivre, pour aller avec le roi à Jérusalem ? J’ai