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avec la pleine approbation de sa femme, à la grande joie de sa fille et du précepteur, le pare consent au mariage de ces jeunes gens : pour célébrer les fiançailles, tout le monde se met à table. — Et de deux !

Par la première de ces pièces, nous savons comment se fonde la famille ; par la seconde, ce qu’il en advient, — toujours dans la bourgeoisie. Un bourgeois fera-t-il sagement de ne pas se marier, ou, s’il a cette chance de se trouver veuf et sans enfans, indemne, aura-t-il raison de s’y tenir ? La Pelote nous répond. — Ainsi retiré du mariage, et même, entre temps, retiré des affaires, le brave homme que nous voyons n’est déjà plus que la chose de sa gouvernante ; il va devenir sa proie. Hier soir, pour la première fois depuis vingt ans, il n’est pas rentré ; la servante-maîtresse n’a pas envie de redescendre au rang de servante ; ayant prévu la crise, elle a fait venir de la campagne, elle attend ce matin, justement, une jeunesse qui sera son instrument de règne : sa nièce. Appelée à occuper peu à peu, au moins pour leur compte commun, la place de sa tante, à présent trop desséchée, elle arrive à point, cette fillette rebondie. — Au deuxième acte, avec la nièce, voici le neveu, qui n’est pas seulement son cousin mais son galant, voici même leur grand’mère, pour surcroît de renfort. Sous la haute direction de la tante, ces gens-là tous à l’envi grugent la maison : ils l’aident, comme elle dit, après qu’elle « sacrifié ses plus belles années, « à tirer son épingle du jeu. » J’oubliais un auxiliaire, — celui précisément qui s’écrie qu’elle met de côté, non pas une épingle, mais toute une « pelote : » — son beau-frère, premier clerc dans une agence de renseignemens. Il a pourtant une belle part dans les opérations : il doit combattre et dissiper le peu de parenté que notre homme, isolé chez lui par cette compagnie, peut avoir dans le voisinage, — une nièce, ou plutôt la veuve d’un neveu, et sa petite fille. En attendant qu’il ait démontré par de fausses lettres que cette jeune femme a couru les aventures, et que son enfant n’est pas né du neveu, toute la clique paraît un moment mise en péril. A force d’effronterie, pendant une visite que ces deux malheureuses font à leur oncle, — c’est le 1er janvier, — on tire de sa conscience amollie une étincelle, on fait éclater sa colère. On lui réplique aussitôt avec dignité, on lui met le marché à la main, on se laisse jeter dehors… Ah ! la bonne vie qu’il va mener, avec sa nièce en face de lui à table, et la petite fille entre les deux. Mais, après dîner, il faut qu’elles le quittent ; et, la soirée s’avançant, le silence, le désert de l’appartement l’effraie. Tout à coup, on frappe à la porte ; une voix fraîche se glisse par la serrure : c’est la nièce de l’autre, et l’autre qui la ramène ; elles rentrent dans la maison, — chez elles…

Oh ! oui, chez elles : au troisième acte, qui se passe quelques