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limitrophe du pays d’Herbauges et entouré d’un mystère semblable : le pays de Tiffauges. Les Teiphalli des anciens géographes, souche primitive des habitans de ce pays, sont présentés comme une population scythe ou slave, implantée parmi les Pictons. Jusqu’où avait-elle pénétré, soit en Poitou, soit dans les régions avoisinantes de l’Anjou et de la Bretagne ? On n’en sait rien ; mais le pays de Tiffauges, comme celui d’Herbauges, paraît s’être étendu, au nord, bien près de la Loire. Il confinait, du côté de l’Anjou, à un autre pays, mieux délimité : le pays des Mauges. C’est la Vendée angevine de M. Célestin Port. Une légende, que M. Port a encore détruite, attribue à César la première mention des Mauges, et veut que ce nom dérive de mala gens. Le conquérant aurait flétri, par cette dénomination, une contrée qui lui aurait obstinément résisté. La légende est fausse ; l’étymologie reste douteuse ; mais il est certain que l’unité du pays des Mauges était constituée dès l’époque gallo-romaine. Elle a persisté à travers le moyen âge et les temps modernes. Elle se maintient encore dans le langage courant et dans les noms de plusieurs localités, comme le Pin-en-Mauges, le village de Cathelineau. Entre les pays de Tiffauges et des Mauges et les autres parties du Poitou, de la Bretagne et de l’Anjou qui ont concouru à la formation de la Haute-Vendée, quels qu’aient pu être leurs liens dans des temps reculés, des points précis de rapprochement s’étaient établis et maintenus jusqu’à la révolution. C’étaient d’abord les Hautes-Marches du Poitou et de la Bretagne, pays neutre et privilégié, comme les Basses-Marches, qui jouissait, entre autres faveurs, de l’exemption du service militaire. Or on sait quel rôle a joué dans l’insurrection vendéenne l’antipathie pour le recrutement. C’était aussi, en Poitou, l’élection de Châtillon-sur-Sèvre, que la révolution devait partager entre les départemens des Deux-Sèvres et de la Vendée, mais dont elle ne pouvait supprimer du même coup, pour les habitans, l’unité séculaire. Dans une province dont la plus grande partie n’avait avec sa capitale que des rapports difficiles et réduits aux grandes affaires, les subdivisions administratives avaient une importance considérable. Châtillon, devenue le chef-lieu d’un simple district du département des Deux-Sèvres, resta un centre pour les communes du département de la Vendée qui en avaient été détachées. Elle était préparée à devenir un centre plus important encore pour toute la Haute-Vendée, comme siège du conseil supérieur.

Un centre d’un autre ordre s’était créé sur les confins du Poitou et de l’Anjou, à Cholet. Cette ville industrieuse était devenue, par le travail qu’elle demandait aux tisserands de tout le pays et par la clientèle de son commerce, une sorte de capitale pour la région qui