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tissus (et dans le sang lui-même, bien que faiblement) avec une importance fort inégale, étant plus considérable pour les muscles, le cerveau et les glandes, et plus faible pour les os et divers autres élémens anatomiques.

La calorification est-elle le résultat de combustions, d’oxydations seulement? On l’a cru pendant un temps assez long, mais en réalité d’autres influences interviennent dans cette fonction. En effet, l’organisme est le théâtre de phénomènes chimiques infiniment variés. Les matériaux empruntés aux alimens sont assimilés à la suite d’actions chimiques très diverses, et la désassimilation s’accompagne de phénomènes non moins variés; et toutes les combinaisons, dissociations, réductions, etc., dont les différentes matières sont l’objet dans l’organisme, donnent invariablement naissance à un dégagement ou à une absorption de chaleur. En langage vulgaire, toute réaction chimique produit de la chaleur ou du froid, selon les cas, et d’après des lois chimiques maintenant bien élucidées.

Parmi les phénomènes chimiques de ce genre, et dont les exemples sont fréquens dans l’organisme, phénomènes qui ont été admirablement étudiés par M. Berthelot, nous citerons en particulier les hydratations, les dédoublemens, les réductions, les synthèses, les fermentations. Tous ces phénomènes se présentent dans le corps de l’animal vivant, et tous jouent un rôle dans la calorification. Celle-ci est donc le résultat d’actions chimiques multiples qui se passent dans tous les points de l’organisme, actions dont les unes produisent et les autres absorbent de la chaleur, mais parmi lesquelles les premières sont évidemment prédominantes. Parmi les phénomènes thermogènes, les oxydations demeurent les plus importans, assurément; mais il est bon de savoir qu’elles ne sont pas seules calorigènes, comme le pensait Lavoisier.

Le simple fait que la respiration ne présente pas la même activité dans tous les tissus indique a priori qu’il doit y avoir dans la température de ceux-ci des différences appréciables. Tel est le cas, en effet, bien que dans l’organisme vivant l’égale répartition de la température soit favorisée par le contact des parties très calorifiques avec celles qui le sont moins, soit directement, soit indirectement, par la circulation du sang. Malgré cette tendance à l’établissement de l’équilibre thermique, l’on distingue aisément les parties les plus calorifiques. Ce sont naturellement les plus actives au point de vue chimique, et celles qui respirent le plus : ce sont le foie, le cerveau, les glandes, le cœur, les muscles, et la chaleur dégagée par ces organes est d’autant plus considérable que leur activité chimique est plus grande, et qu’ils fonctionnent davantage. Tout organe est, en effet, plus chaud à l’état d’activité qu’à l’état de repos.