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d’année en année parmi ses travailleurs, de même race que lui, et, en somme, copropriétaires du sol.

Cette sorte de demi-esclavage, répandu chez les Cinq-Nations, est inhérente au système agraire actuel. Si bien que l’on pourrait appliquer à la plupart des indigènes du Territoire-Indien ce que l’on disait autrefois des fellahs : « Ce peuple paraît destiné à travailler pour les autres sans recueillir lui-même les fruits de son labeur. »

À la suite d’un vote presque unanime du congrès, le président des États-Unis promulgua, le 8 février 1887, la loi du partage des terres (Allotment Act). En vertu de cette loi, le président peut faire mesurer chaque réserve indienne ou partie de réserve et en répartir les parcelles, à titre de possession individuelle, entre les indigènes qui l’habitent.

Cet acte règle la superficie des lots à accorder à chaque chef de famille, aux enfans et aux orphelins, ajoutant que les partages seront faits par les agens titulaires affectés aux réserves respectives, assistés de délégués spéciaux que le président nommera à cet effet. Une pièce officielle constatant le partage, et constituant un véritable titre de propriété, sera remise à l’Indien concessionnaire ; copie de cet acte sera déposée aux archives du bureau des Terres. La division du territoire entre tous les membres d’une tribu une fois effectuée, le secrétaire de l’intérieur peut négocier avec cette tribu la vente des terres non concédées, ces négociations devant être soumises à la délibération du congrès. Dans le cas où des terrains de l’espèce seraient vendus, la somme représentant le prix sera versée au trésor des États-Unis, au compte de la tribu. Le congrès devra employer l’intérêt de cette somme, fixé à 3 pour 100, au développement de la civilisation du clan en question. Enfin, tout Indien qui accepte un lot de terre à titre de concession individuelle devient, ipso facto, citoyen des États-Unis.

Telle est, dans ses grandes lignes, l’économie de la nouvelle loi du partage des terres.

Les indigènes de quelques réserves se montrent opposés à cet établissement de la propriété individuelle. Fiers de leurs coutumes barbares, ils considèrent avec méfiance toute innovation qui porte atteinte à leur existence nomade.

Comme dans le Aïeux monde, les masses indiennes accoutumées à écouter et à obéir, adoptent volontiers les idées de leurs chefs. Ceux-ci pressentent que l’allotment marquera la ruiné de leur influence et de leur pouvoir. Notamment, dans le Dakota, ils tentèrent de soulever leurs tribus contre cette loi nouvelle qui devait entraîner des changemens si profonds. Aussitôt que vous aurez vos