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… Il sera plein de gloire, et il régnera sur son trône ; et le prêtre sera aussi sur son siège, et il y aura esprit de paix entre les deux ((6-12-13). »

On ne peut méconnaître Hérode dans ce roi qui pousse de lui-même, et non pas d’une autre tige, et qui partage en quelque sorte avec un grand-prêtre sa dignité.

L’auteur du psaume 110, qui est sans doute aussi du temps d’Hérode, et qui lui fait dire par Jéhova : « Sieds à ma droite, » n’a pas besoin d’autre prêtre que le roi lui-même, et ne craint pas de lui dire : « Tu es prêtre à jamais (toi et les tiens) suivant l’institution de Melchisédech. » C’est-à-dire comme ce vieux roi de Salem (la même que Jérusalem), que la Genèse nomme dans l’histoire d’Abraham (14-18), et qui y figure à la fois connue roi et comme prêtre. Ainsi s’explique ce verset, autrement inexplicable, car ce n’est pas l’expliquer que le rapporter au personnage imaginaire du Messie.

Comme Aggée, Zacharie dit encore que c’est à partir du Temple rebâti que renaît la prospérité de Jérusalem (8-10), que Juda et Israël seront désormais aux yeux des nations le peuple béni, comme elles étaient en d’autres temps le peuple maudit (2-13) ; que de tous côtés on affluera vers Jérusalem ; que d’une ville à l’autre les gens se diront, : « Allons, cherchons Jéhova Sabaoth ; moi aussi, j’y irai ; et les hommes des Nations de toutes les langues saisiront le pan de la robe du juif, disant : Nous allons avec vous, car nous savons qu’un dieu est avec vous (8-20-23). » Aucun passage n’accuse mieux la modernité de cette prophétie. Et le mot même de Juif ou Judéen (Iehoudi) est un mot nouveau, qui ne se trouve jusque-là dans aucun prophète[1], et qui n’a pu s’introduire que quand Israël ne s’est plus distingué de Juda, et que toutes les tribus ensemble ont formé ce que les Nations ont appelé la Judée, car ce dernier mot est également nouveau.

Il y a dans Zacharie une menace adressée à Tyr (9-2-4), mais ce passage n’est pas plus satisfaisant que ceux qu’on a lus dans d’autres prophéties. Pour voir Tyr brisée dans sa puissance au milieu de la mer, pour la voir en feu, il faudrait remonter jusqu’à l’époque d’Alexandre. Mais d’après ce qui suit jusqu’au verset 7, il semble que, dans Zacharie comme dans le Premier Isaïe, le souvenir de cette catastrophe n’est rappelé que pour montrer ces peuples des bords de la mer, autrefois frappés par Jéhova (9-4), revenus maintenant à lui, et se confondant avec les Juifs pour l’adorer (9-7). (Voir Isaïe, 23-18.)

  1. Excepté dans les vingt derniers chapitres de Jéremie. J’aurai à m’expliquer plus tard sur cette exception.