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par là son impartialité : nous voyons sans jalousie le développement que la production du vin a pris sur le globe, malgré le préjudice qui peut en résulter pour nos intérêts. Nous ne sommes pas habitués à envisager les questions d’économie sociale à ce point de vue-là, et, d’ailleurs, il faudra bien des années avant que les vins d’Amérique et d’Australie détrônent nos grands crus de la Bourgogne et du Bordelais et surtout notre vin de Champagne, qui n’a pas de rival à l’étranger.

La production en augmente tous les ans dans une proportion notable. C’est lui qui occupe le plus de place au quai d’Orsay ; une galerie tout entière lui est consacrée. Une seule maison accuse une production de 2 millions de bouteilles par an. C’est celle qui expose l’immense tonneau devant lequel tous les visiteurs s’arrêtent. Ce foudre énorme se dresse sur quatre forts piliers en fonte dissimulés par les feuilles entrelacées d’un pampre artificiel. La grande tonne d’Heidelberg n’était rien à côté. Il porte fièrement, sur le milieu d’une de ses larges bases, l’indication de son contenu : 1,800 hectolitres, 200,000 bouteilles. L’hygiéniste se voile la face devant de pareils chiffres. Il suppute que, si ce grand vaisseau était rempli d’alcool, son contenu suffirait pour enivrer 1 million d’hommes ; mais ce n’est pas la liqueur malfaisante fabriquée par l’industrie que le grand tonneau de l’Exposition est destiné à contenir, c’est le vin généreux de la Champagne, et c’est lui que la France offre à l’Angleterre sous la forme d’une grappe de raisin, dans le groupe symbolique qui en décore la face principale.

L’alcool, Hélas ! a également sa place à l’Exposition. Les distilleries des départemens du Nord y ont envoyé leurs produits et les spécimens de leur outillage. Les autres nations ont fait de même. La Russie, en particulier, a expédie de nombreux échantillons de ses fabriques de Varsovie. On sait qu’elle consomme des quantités effrayantes de ce dangereux liquide. L’impôt dont il est frappé rapporte, par an, 700 millions de francs au Trésor.

Tous les pays où croit la canne ont expédié des rhums à l’Exposition. Cette fabrication a pris une grande importance dans les colonies. Leurs sucres ont de la peine à soutenir la concurrence avec ceux qu’on retire de la betterave, tandis que le rhum et le tafia sont très demandés, depuis que l’eau-de-vie de vin est hors de prix et que les effets désastreux des esprits d’industrie sont mieux connus.

Les céréales, les vins et les spiritueux ne sont pas les seuls articles qui intéressent l’hygiène dans les galeries de l’alimentation ; il en est d’autres qui la concernent même d’une façon plus directe. Les procédés de conservation des alimens sont dans ce cas. Cet art a fait des progrès notables, dans ces dernières années, par l’emploi