Page:Revue des Deux Mondes - 1890 - tome 100.djvu/21

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•) HALLALI ! 1 5 tience nuancée d’embarras. Si encore tu étais de l’avis de Ion mari et si tu patronnais, comme lui, M. Lecourtois ou xM. de Remille- mont... — Et pourquoi pas Frantz? Ne leur est-il pas, de tous points, supérieur? et ne le connaissons-nous pas depuis plus longtemps? Tes parens, comme les miens, ne l’ont-ils pas fréquenté? n’ont-ils pu l’apprécier, lui qui lut si souvent leur hôte ou leur commensal et qui, en camarade aîné, nous accompagna si souvent dans nos promenades autour de Nancy, à pied ou à cheval? — D’abord, c’est surtout toi et tes parens qui l’avez connu de bonne heure. — Soit. Mais vous l’avez connu aussi. Ta pauvre mère même l’a connu... En tout cas, toi et ton père, vous le connaissez bien main- tenant... Et tout le monde le connaît, puisqu’il est célèbre. — Tiens, fit la jeune fille en mettant sa main gantée sur la bouche de sa cousine, tu finiras par m’agaceravec cette idée de mariage et par me faire prendre en grippe ton candidat, ton protégé... Pro- tégé ! Le pauvre garçon ! Tu oublies toujours , ma bonne petite Hélène, que je ne suis pas dans la position de fortune qui t’a per- mis d’épouser le baron de Buttencourt-Rubécourt, plus riche d’espé- rances, grâce à sa grand’mère et à ses oncles, qu’il ne l’était d’écus comptans. Ton père et le mien, quoique frères et ayant eu le même point de départ : une brasserie du grand-duché de Luxembourg, d’où ils vinrent séparément s’établir en Lorraine, ont eu des des- tins bien dhïérens. Mon oncle a commencé par échouer, pour réus- sir ensuite; mon père n’a réussi d’abord que pour mieux échouer, à la fin. Ta fortune est devenue inchilïrable ; la mienne ne mérite même plus d’être chiffrée. — Mais, puisqu’il y a encore des gens chevaleresques qui veu- lent t’épouser pour tes très beaux yeux!.. — 11 faut être riche aujourd’hui pour avoir le droit d’être cheva- leresque , dit Marie-Madeleine avec une espèce de rudesse dont l’accent était un peu outré. — D’abord, Frantz n’est pas pauvre : fils unique, il a recueilli tout l’héritage paternel; en outre, il gagne de l’argent, dit-on... Et puis, voilà une réflexion, qui, de ta part, m’étonne! La jeune fille embrassa sa cousine pour lui cacher des larmes qu’elle avait senties sourdre de son cœur et monter lentement jus- qu’à ses yeux. — Eh bien! murmura-t-elle, ne me parle plus de cela, si tu ne veux pas que je t’étonne davantage. Et laisse-moi coiffer en paix sainte Catherine. — C’est que, vois-tu, chère folle aînée, pour coiffer sainte Cathe-