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mamelucks y possédaient de vastes maisons remplies de femmes. Leur principal luxe consistait à en avoir de belles, de beaux chevaux et de belles armes.

On ne peut savoir quelle est la population du Caire, parce qu’on n’y tient aucun registre de l’état civil. On la supposait, à notre arrivée, d’environ 600,000 âmes, parmi lesquelles il y avait beaucoup de juifs, des chrétiens de toutes les églises, quelques commerçans européens, mais en très grande majorité des musulmans.

La négligence des habitans est telle que, si un animal meurt dans la rue, ils le laissent sur place, où il infecte l’air jusqu’à ce qu’il soit complètement desséché. Ils ne détruisent aucune espèce d’animaux nuisibles ou incommodes. Les maisons sont constamment fermées à l’extérieur. Les maisons pauvres ont seules des sortes de fenêtres ; ce sont des soupiraux grillés. Les maisons des indigènes riches n’ont jamais de fenêtres à l’extérieur, toutes les ouvertures donnent sur des cours intérieures. Toutes les maisons sont couvertes en terrasses. Il existe au Caire des mosquées très vastes, surmontées de plusieurs flèches, d’une très grande hardiesse, que l’on appelle minarets. Le nombre des minarets, très grand au Caire, donne à la ville un fort bel aspect. Rien n’est plus bizarre que d’entendre des crieurs religieux, appelés muezzins, qui, du haut de ces flèches, annoncent les heures et appellent les fidèles musulmans à la prière. Ils sont nécessaires, car il n’existe pas une seule horloge dans toute l’Égypte.

Le 2 août, mon bataillon reçut l’ordre de partir pour la haute Égypte. Ce bataillon était très faible, parce que c’était celui qui avait le plus souffert à la bataille des Pyramides. Nous partîmes, sous les ordres du général Rampon, qui commandait une brigade de la division Bon. C’était lui qui avait été colonel en second de la 32e à Montenotte. Nous bivouaquâmes à deux lieues au-dessus du Caire ; nous devions suivre le Nil.

Le 3, nous arrivâmes au village de Thévené. Nous y fûmes rejoints par deux avisos, qui devaient appuyer, par le Nil, nos opérations sur ses rives. Le 4, après avoir été harcelés toute la journée par des Arabes, ’nous couchâmes au village de Kubah. Le 5 août, nous arrivâmes à Elfiel, notre destination.

Elfiel est un grand village, situé sur la rive droite du Nil, un peu dans les terres, à quinze ou dix-huit lieues au sud du Caire. Les maisons, ou plutôt les huttes, de tous ces villages sont construites en grosses briques de terre argileuse, non cuites, mais séchées au soleil.

Les vivres nous furent d’abord expédiés du Caire, par le fleuve, assez régulièrement. Les distributions faites à la troupe, en Égypte, se composaient de viande de buffle ou de mouton, de riz ou de