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créer des générations exemptes de scrofule, plutôt qu’à relever celles qui en étaient entachées.

Le livre du docteur Russel[1] eut, en Angleterre, un succès hors ligne. C’est depuis sa publication que l’aristocratie anglaise a délaissé ses manoirs héréditaires, pour se faire construire des cottages sur le bord de la mer et que l’éducation des enfans a été tournée vers la vie au grand air, les exercices de corps et les voyages. Il y a un siècle que cette révolution s’est opérée dans l’éducation anglaise, et nous commençons à peine à entrer dans la même voie. Il a fallu, pour nous y pousser, toute la puissance de conviction, toute l’ardeur de propagande, que les hygiénistes contemporains ont mises au service de cette grande cause.

Le premier établissement maritime créé en Angleterre, pour le traitement des scrofuleux, fut le Royal sea bathing infîrmary for scrofula, élevé à Margate en 1791, soixante ans avant qu’il fût question de l’hôpital de Berck et des hospices marins d’Italie. Le cottage primitif a fait place à un grand et bel établissement disposé pour recevoir deux cent cinquante malades.

D’autres hôpitaux semblables se sont construits en Angleterre depuis cette époque. Celui des coxalgiques de Londres possède à Boumemouth-West-Hill-Road une succursale qui reçoit chaque année une cinquantaine d’enfans. Il existe à Seaford (Sussex) un hôpital qui contient soixante-quinze lits et demeure ouvert toute l’année. De 1860 à 1885, cette maison a reçu plus de neuf cents malades. On compte encore des refuges du même genre à Brighton, à Hastings-Tite, et d’autres hôpitaux de Londres ont, comme celui des coxalgiques, des succursales au bord de la mer.

La première nation qui suivit le mouvement suscité par Russe ! en Angleterre, fut l’Italie. Elle se mit en marche à l’appel d’un médecin qui joignait, à l’ardeur d’un apôtre, l’éloquence d’un grand orateur. C’est Giuseppe Barellaï qui a entrepris et mené à bien, à travers toutes les grandes villes de l’Italie, cette généreuse croisade qui n’a fini qu’avec sa vie.

Le 12 juin 1853, il porta la question devant la Société de médecine de Florence, et sa communication fut le point de départ d’un débat d’où sortirent les hôpitaux marins de la péninsule. Fort de l’approbation unanime des membres de cette compagnie, il s’adressa à la charité privée, en commençant par les plus grandes familles de Florence, et organisa un comité sur les listes duquel s’inscrivirent bientôt les plus beaux noms de la Toscane. Enfin, il eut la joie de posséder son ospizio marino, qu’il vit s’élever sur une plage voisine du petit village de Vareggio. « On connaît, dit

  1. R. Russel. De tabe glandulari, seu de usu aquœ marinœ in morbis glandularum. Oxford, 1850.