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après sur le Victoria-Nyanza. L’expédition reconnaissait l’Ouganda et faisait sa jonction avec sir Samuel Baker, venu du nord, par le fleuve. M. Baker achevait de résoudre le problème en suivant le Nil jusqu’à l’Albert-Nyanza. — On tenait enfin les principaux fils de l’écheveau ; le nourricier de l’Egypte puise ses eaux dans les grands réservoirs situés sous l’équateur ; au-delà, de faibles relèvemens de terrain rejettent vers l’ouest et le sud les affluens des réservoirs voisins, qui vont grossir d’une part le Congo, de l’autre le Zambèze, par le canal du Chiré.

L’Egypte conclut de ces découvertes qu’elle devait posséder tout le bassin de son fleuve ; le khédive multiplia les expéditions géographiques et militaires, sous la conduite de Baker, de Gordon, de Chaillé Long, de Piaggia ; un instant, il parvint à rétablir dans son intégrité l’empire méridional des anciens Pharaons, si, comme le croyait Mariette, Touthmès a régné jusqu’à l’équateur. L’Europe a condamné en bloc les fautes et les prodigalités d’Ismaïl-Pacha : sur un point au moins, l’avenir réformera cette condamnation. Ceux qui ont vécu au Caire, dans ces années brillantes où tout y respirait les larges ambitions et les vastes espérances, ceux-là ne peuvent pas oublier que l’Egypte était alors la terre promise des explorateurs, le principal loyer des découvertes géographiques. En poursuivant au Soudan oriental ses vues politiques, Ismaïl-Pacha rendait un service inappréciable à l’œuvre de la civilisation, si brusquement ruinée après sa chute.

Depuis 1870, les voyageurs ont sillonné l’Afrique en si grand nombre qu’il faut renoncer à les énumérer. Il suffira de rappeler leurs travaux les plus marquans, jusqu’au moment où l’action politique des grands états se substitua aux recherches scientifiques. Dans la région australe, le lieutenant Cameron continua les entreprises de Livingstone, qu’il était allé secourir ; sa traversée du continent, de Zanzibar à Benguela, fut l’un des plus beaux exploits de cette période ; elle lui permit de reconnaître le système général des affluens méridionaux du Congo. Le major Serpa Pinto lui succéda de ce côté, avec la même hardiesse et le même bonheur. Sur la côte orientale et dans le bassin du Nil, avant le jour où l’irruption des mahdistes ferma le fleuve, la carte d’Afrique fut complétée par les missions égyptiennes, par Linant, Gessi, Munzinger, Emin-Pacha. M. Stanley réussit à rejoindre Livingstone ; il commençait sa renommée en naviguant sur les grands lacs, il levait les derniers doutes qui nous restaient sur leur situation, leurs formes et leurs rapports. Entre les rives du Tanganyka, du Victoria et de l’Albert-Nyanza, les missions catholiques et protestantes multiplièrent leurs stations. Le pays des Niam-Niam et des Monbouttou s’ouvrit devant MM. Schweinfurth et Piaggia. En Abyssinie, au