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Page:Revue des Deux Mondes - 1891 - tome 104.djvu/207

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L’ALLIANCE FRANCO-RUSSE
SOUS
LE PREMIER EMPIRE
D’APRÈS UNE PUBLICATION RÉCENTE

Joseph de Maistre écrivait à son roi le 31 janvier 1806 qu’aussitôt après la bataille d’Austerlitz, Napoléon, très désireux de s’aboucher avec l’empereur Alexandre, lui avait dépêché son aide-de-camp Savary pour lui demander une entrevue, mais que le tsar avait décliné cette invitation et chargé le prince Dolgorouki de dire au vainqueur qu’il ne comprenait point quel pourrait être l’objet de la conférence proposée, « C’est la paix, répondit Napoléon ; je ne conçois pas pourquoi votre maître refuse de s’entendre avec moi, je ne demande qu’à le voir et à lui présenter une feuille blanche signée : Napoléon, sur laquelle il écrira lui-même les conditions de la paix. » Joseph de Maistre ajoutait : « Quelques personnes ont vu dans ces démarches de Bonaparte un piège tendu à l’empereur Alexandre pour se donner au moins le plaisir de faire écrire dans les gazettes françaises que l’empereur de Russie s’était rendu chez celui des Français… Je crois bien que son intention était de tirer parti de l’entrevue, si elle avait été accordée ; rien de plus naturel ; mais je crois aussi qu’il eût été moins difficile qu’on ne le croit sur les conditions qu’on aurait pu proposer, et que surtout il n’aurait fait aucune difficulté sur le puntiglio. Je ne doute pas un moment qu’il ne se fût rendu lui-même chez l’empereur de Russie ou qu’il n’eût fait volontiers la moitié du chemin… Mais enfin l’empereur n’a pas voulu de cette conversation. Il est, au reste, le prince le plus fait pour adresser la parole à l’heureux usurpateur. Il