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La part des Sociétés d’agriculture aura été grande et méritoire dans l’élaboration qui marqua cette période préparatoire. Rien n’y manqua : enquêtes étendues à toute la France par la Société centrale qui siège à Paris, discussions approfondies, rapports savans empreints d’un caractère pratique. On y envisageait les difficultés avec une grande fermeté de coup d’œil sans qu’on s’en laissât décourager ; car, ce qui est à remarquer surtout, c’est la persistance, la ténacité avec laquelle ces compagnies reviennent à la charge pour réclamer le crédit agricole, c’est-à-dire la faculté de l’établir. Je ne puis me dispenser de rappeler quelques-unes de ces manifestations qui montrent l’importance qu’y attachent ces corps qu’on peut considérer comme une représentation de l’agriculture française. En date du 29 décembre 1883, après avoir déjà à maintes reprises fait de la question l’objet de ses délibérations, la Société nationale d’agriculture était mise en demeure par le ministre compétent de s’occuper du crédit agricole. Ce fut l’occasion de nouveaux vœux, faisant suite à ceux qu’elle avait émis en 1862 : vœu pour établir le bail à cheptel dans des conditions de pleine liberté, pour constituer le nantissement sans tradition, en des cas déterminés, vœu pour étendre les privilèges du prêteur sur certains meubles, etc. L’enquête de 1889, la plus complète de toutes, consignée en deux volumes par la Société, aboutissait à un rapport de M. Josseau, dont la compétence était connue dans ces questions de crédit foncier et de crédit agricole. Ce rapport motivait avec force les conclusions favorables, appuyées sur tous les faits nouveaux que l’expérience avait mis en lumière. Qu’une cause soit soutenue avec une telle persévérance par une société composée à la fois de savans illustres et d’agriculteurs, il nous semble qu’il a là une indication dont nos chambres auraient à tenir quelque compte. Une autre Société, celle des agriculteurs de France, qui compte des milliers d’adhérens, presque tous cultivateurs pratiquans, ne s’est pas ménagée davantage au service des mêmes pensées de réforme, et si nous ne rappelons pas les vœux qu’elle a énoncés à plusieurs reprises, c’est pour ne pas mettre la patience des lecteurs à l’épreuve en multipliant ces témoignages.

Mais comment ne pas dire un mot de la position prise par le congrès international d’agriculture à l’Exposition universelle de 1889 ? Dans cette réunion de propriétaires, de cultivateurs et de savans nationaux et étrangers, accourus en très grand nombre, on peut dire que presque toutes les questions actuelles relatives à l’économie et à la législation agricoles ont été examinées. On s’organisa en sections, on se réunit en séances publiques. Le crédit agricole y tint sa place au premier rang. Tous