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de bacilles. Les domestiques les secouent avec les tapis et les répandent dans l’atmosphère extérieure.

On peut respirer partout ces poussières contaminées, mais plus particulièrement dans les lieux clos où séjournent des phtisiques. De là, le danger de vivre dans un contact continuel avec ces malades, de là, le péril plus grand de la cohabitation conjugale. Ce ne sont pas là des craintes hypothétiques. Des expériences faites suites animaux ont maintes fois démontré qu’ils devenaient tuberculeux, quand on leur faisait respirer cette poussière remplie de bacilles.

L’haleine des phtisiques n’est pas dangereuse. L’air qui s’échappe de leur poitrine est toujours exempt de microbes. Les expériences le prouvent d’une manière positive ; mais, s’il survient une quinte de toux, il peut s’échapper, des foyers tuberculeux, des particules très fines qui, projetées au dehors avec l’air violemment expulsé, peuvent être inspirées par les personnes qui se trouvent devant les malades.

La contagion par les voies digestives est beaucoup moins fréquente, mais elle est possible. M. Chauveau a rendu tuberculeux des animaux de l’espèce bovine, en leur faisant ingérer, avec leurs alimens, des parcelles d’organes contenant des bacilles. On y parvient également, quoique avec difficulté, dans d’autres espèces ; mais celles-là n’offrent pas pour nous le même intérêt que les bovidés dont le fait et la chair tiennent une si large place dans notre alimentation. On peut enfin contracter la tuberculose en buvant de l’eau souillée par des infiltrations provenant de fosses d’aisances, car les déjections alvines des tuberculeux arrivés à la période de consomption renferment de nombreux bacilles.

Il ne faut pas conclure de ce qui précède que la phtisie est contagieuse comme les maladies éruptives. Il faut même se tenir en garde contre la tendance à l’exagération, qu’ont fait naître les découvertes récentes. Toutes les fois qu’un fait scientifique est mis en lumière pour la première fois, on est disposé à lui attribuer plus d’importance qu’il n’en mérite. Après avoir nié la contagion pendant des siècles, les médecins sont enclins aujourd’hui à la voir à peu près partout. Il faut prendre un terme moyen et ramener les choses à leur juste valeur.

Les faits de contamination entre époux, les premiers qui aient appelé l’attention, sont aussi les plus fréquens et les plus incontestés. Tantôt c’est un mari tuberculeux qui épouse successivement plusieurs femmes saines et qui les voit mourir de phtisie, les unes après les autres, avant de succomber à son tour ; tantôt c’est un poitrinaire qui contamine sa femme et succombe ; celle-ci se remarie et communique la tuberculose à son second époux qui,