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sur le devant, de terrasses abritées par des marquises et accessibles à tous les vents. Les malades y passent de sept à dix heures par jour, étendus sur des chaises longues, dans lesquelles ils sont chaudement emmaillotés pour ne pas se refroidir. Cette exposition se fait par tous les temps, malgré le brouillard, le vent et la neige, et par des températures qui descendent parfois à 12 degrés au-dessous de 0. La nuit, on les fait coucher dans des chambres où l’on entretient un courant d’air à l’aide de la cheminée et de la fenêtre qu’on a soin de laisser entr’ouverte. Ce traitement est complété par des repas fréquens, par le régime lacté, et l’administration de l’alcool suivant les cas. Enfin les malades qui ont encore assez de force font des promenades et se livrent à des exercices gymnastiques.

Le docteur Detweiler, qui dirige l’établissement de Falkenstein, a rendu compte au congrès de médecine de Wiesbaden, en 1887, des résultats produits par ce traitement. Ils sont admirables ; je l’ai déjà dit. Il a guéri plus ou moins complètement le quart de ses malades. Les médecins savent à quoi s’en tenir sur les succès de ce genre ; ils connaissent la part qu’il faut faire aux illusions des confrères qui préconisent une méthode nouvelle, et cependant la communication du docteur Detweiler a fait sensation au congrès de Wiesbaden. Il en a été beaucoup parlé depuis, et l’an dernier, on a fondé en France un établissement semblable. C’est le Sanatorium du Canigou, que dirige le docteur Sabourin. Il est situé dans les Pyrénées-Orientales, près du Vernet, à une altitude de 700 mètres et sous un climat beaucoup plus favorable que celui de Falkenstein, puisque le palmier, l’aloès, le laurier-rose croissent en pleine terre dans cette localité privilégiée. Inauguré au mois d’août 1890, le Sanatorium du Canigou a été ouvert aux malades le 1er novembre de la même année.

On ne s’est pas contenté de faire voyager les phtisiques et de les exposer au grand air, on a essayé de les traiter sur place par les atmosphères artificielles. On les a placés sous des cloches où l’air se comprime à l’aide de machines ; on leur a fait respirer de l’air surchauffé, de l’oxygène, des vapeurs d’acide fluorhydrique. Ce dernier moyen a même fait concevoir, pendant un moment, de grandes espérances ; puis il est tombé dans l’oubli comme les autres.

Est-ce à dire que tous les agens de la thérapeutique sont dénués de toute valeur ? Non sans doute. En les maniant avec habileté, en les faisant intervenir au moment opportun, en les combinant, suivant les circonstances, on parvient à guérir, c’est-à-dire à arrêter dans leur marche quelques phtisies au début ; on prolonge l’existence d’un grand nombre de malades ; mais nous attendons encore