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faibles doses. Lorsqu’ils apprirent, l’an dernier, la communication faite au congrès de Berlin par le docteur Koch, au sujet de sa nouvelle découverte, ils s’empressèrent de communiquer à l’Académie des sciences le résultat de leurs travaux. Leur note se terminait par la conclusion suivante : « Nous croyons avoir réussi, d’une part, à donner aux lapins une résistance prolongée contre la tuberculose la plus rapide et la plus certaine, et d’autre part à leur conférer, contre la même maladie, une immunité dont il reste à déterminer la durée. » A la même époque, MM. Roux et Mentschikof poursuivaient, dans le laboratoire même de M. Pasteur et sous sa direction, des recherches qu’ils ne feront connaître que lorsqu’elles auront atteint le degré de maturité nécessaire.

D’autres expérimentateurs ont suivi une voie plus nouvelle. Se fondant sur l’inégalité de résistance que les différentes espèces opposent à la tuberculisation, ils ont eu l’idée de rechercher s’il ne serait pas possible de transformer la constitution des animaux qui y sont le plus accessibles, en leur infusant du sang provenant des espèces les plus réfractaires, et de leur transmettre ainsi le bénéfice de cette immunité. Le chien et la chèvre sont au nombre des animaux pour lesquels la tuberculose a le moins de prédilection, c’est à eux que les expérimentateurs se sont adressés pour faire leur emprunt.

Les docteurs Ch. Richet et J. Méricourt ont fait l’expérience sur des lapins avec du sang de chien. Ils ont d’abord essayé de l’injecter dans les veines, mais la mort a toujours été le résultat de l’opération. Ils ont alors tenté de le transfuser dans le péritoine, et ils sont parvenus à en faire tolérer de 30 à 50 grammes. En inoculant ensuite la tuberculose chez ces mêmes lapins, ils ont reconnu que la transfusion préalable avait ralenti chez eux, dans une certaine mesure, l’évolution de cette maladie[1].

Enhardis par cette constatation, ils ont tenté l’expérience sur l’homme, en modifiant la manière d’opérer. Ils se sont servis du sérum du sang de chien, et en ont injecté un ou deux centimètres cubes par la voie hypodermique. Les opérations ont été absolument inoffensives. Elles n’ont causé ni troubles généraux, ni accidens locaux, et l’état des cinq malades soumis à l’expérience a paru s’améliorer d’une façon sensible[2].

MM. Bertin et Picq, de Nantes, ont également commencé par opérer sur des lapins ; mais ils ont choisi le sang de chèvre, et ils

  1. De la transfusion péritonéale et de l’immunité qu’elle confère, note de MM. J. Héricourt et Ch. Richet. (Académie des Sciences. Séance du 5 novembre 1888.)
  2. Influence de la transfusion péritonéale du sang de chien sur l’évolution de la tuberculose du lapin, note de MM. J. Héricourt et Ch. Richet. (Société de biologie, séance du 2 mars 1889.)