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l’Autriche-Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie ont vu la valeur de leurs exportations augmenter. Seule l’Italie fait exception à ce mouvement général, et voit la valeur de ses exportations diminuer considérablement.

M. Luzzatti, qui fut rapporteur du projet de loi pour approuver le nouveau tarif douanier, disait vouloir développer les exportations de l’Italie, ou au moins diminuer la différence qui existait entre leur valeur et celle des importations. Or la réduction se trouve être proportionnellement plus forte sur la valeur des exportations que sur celle des importations. C’est donc un résultat précisément contraire à celui que se proposait M. Luzzatti qui a été atteint[1].

On a prétendu que cette diminution de l’importation était un bienfait pour l’Italie ; puisque, dit-on, c’est la production indigène qui s’est substituée à la production étrangère. Cela est vrai en partie, mais pour une autre partie, c’est l’appauvrissement du pays qui en est cause. En effet, l’importation du café a diminué. Où est la production indigène qui peut avoir compensé la différence? La consommation des étoffes de laine a diminué, comme on le constate en réunissant ensemble l’importation et la production indigène[2]. Enfin ce qui est encore plus grave, la consommation du froment a diminué aussi, comme l’a fait voir M. le professeur Mazzola[3], et comme on peut facilement le vérifier. Combien de belles théories s’évanouissent mises en présence des faits !

Il faut encore observer que toutes ces consommations étaient déjà assez faibles ; ce qui dénote la pauvreté du pays[4].

Le commerce intérieur est beaucoup plus difficile à mesurer

  1. La valeur des exportations annuelles de 1878 à 1887, les métaux précieux non compris, a été de 1,075 millions; de 1888 à 1890 elle a été de 903 millions, la diminution est donc de 172 millions. Pour l’importation, on a, pour la première période, 1,310 millions, pour la seconde, 1,294, différence seulement 16 millions.
  2. L’importation annuelle du café de 1881 à 1887 est de 155,000 quintaux métriques, et seulement de 138,000 de 1888 à 1890. Et il faut noter que la population a augmenté. Pour la laine, voyez l’Annuario statistico 1889-1890. On ne fabrique pas de montres en Italie. Or de 1886 à 1887 l’importation moyenne annuelle en Italie est de 413,000 montres, et seulement de 326,000 en 1890.
  3. Giornale degli economisti. Roma, février 1891.
  4. Un mémoire de M. le docteur Broch, inséré dans le Bulletin de l’institut international de statistique 1887, nous fournit les chiffres suivans relatifs aux années 1880-1884. Consommation du café par tête : Italie, 0k, 49; France, lk, 73; Allemagne, 2k, 31; Suisse, 3k, 25; Belgique, 4k, 48. Pour le sucre on a : Italie, 3k, 45; France, 10k, 26; Angleterre, 31k, 30. — Pour la consommation du blé en France, M. Blaise des Vosges a trouvé (Journal des économistes. Paris, juin 1883) 118 kil. par an de 1821 à 1830 et 193 kil. de 1870 à 1880. Un calcul analogue pour l’Italie de 1886 à 1890 donne seulement 114 kil., c’est-à-dire que sous ce rapport l’Italie serait dans les conditions de la France de 1821 à 1830.