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fourni un surplus de 182 millions. Ce sont surtout les douanes qui ont contribué à cette augmentation. De 1878 à 1890, leur produit augmente de 167 millions[1].

Si les budgets de l’Italie présentent des déficits, c’est que les dépenses ont crû dans une plus forte proportion que les recettes.

Il n’est pas facile d’évaluer exactement les déficits des budgets publics, tous les gouvernemens tâchant plus ou moins de cacher la vérité, et ayant recours pour cela aux expédiens les plus subtils. M. Magliani avait, dans ce dessein, imaginé des dépenses ultra-extraordinaires, qui s’ajoutèrent aux dépenses extraordinaires, lesquelles, à leur tour, s’ajoutent aux dépenses ordinaires, et il promettait toujours l’équilibre pour le budget prochain. Cette louable coutume continue à être suivie par ses successeurs. Elle ressemble tort à la promesse inscrite dans certains cabarets de faire crédit un lendemain qui n’arrive jamais.

Les déficits des budgets des recettes et des dépenses effectives commencent en 1886[2], et se continuent jusqu’à présent, en présentant un maximum de 234 millions en 1889. Mais il faut encore tenir compte des dépenses pour la construction des chemins de fer; ces dépenses étant couvertes, pour la plus grande partie, au moyen d’emprunts dont nous avons donné plus haut le chiffre.

Un moyen qui sert aussi assez bien à dissimuler les déficits des budgets est celui des caisses spéciales pour certains services. Nous avons déjà vu comment la caisse spéciale pour le service des pensions avait servi à exécuter un tour de passe-passe, moyennant lequel on avait vendu des titres de la dette consolidée, sans avoir l’air d’emprunter. M. Luzzatti a eu la loyauté de nous avertir que certaines caisses[3], créées par la loi sur les conventions des chemins de fer, « produisaient des dettes en silence. » Ses prédécesseurs n’ignoraient pas cette circonstance, qui est connue de tout le monde, mais ils jugeaient probablement que toute vérité n’est pas bonne à dire.

Il y a ainsi, dissimulés dans les plis du budget, une quantité de

  1. 108 millions en 1878, 275 en 1890. La participation de l’État aux octrois des villes a donné 70 millions en 1878 et 81 millions en 1890.
  2. 23 millions en 1886, 73 en 1888, 74 en 1890.
  3. Les sociétés n’ont que l’exploitation des chemins de fer dont la propriété est demeurée au gouvernement. Celui-ci doit donc faire certaines dépenses d’entretien et d’amélioration, et l’on a chargé de ce service une caisse dite « caisse patrimoniale, » Malheureusement, il ne suffit pas de créer des caisses pour qu’elles fonctionnent, il faut encore les remplir. Le gouvernement n’ayant oublié que cela, il en est résulté les dettes chroniques caractérisées par l’expression pittoresque de M. Luzzatti.