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à sa méthode cette simplicité relative. Il y a fallu beaucoup de travail et de recherches. Par exemple, pour trouver une substance propre à la fabrication de la plaque où se déposent les gouttelettes, M. Aitken a dû se livrer à des expériences nombreuses. Le verre, si fin, si pur soit-il, ne vaut rien : il présente toujours de petits défauts qui troublent la numération, et le physicien écossais s’est arrêté en fin de compte à l’emploi de plaques d’argent fin du plus beau poli. Mais, même avec l’appareil le mieux organisé, M. Aitken a souvent eu des mécomptes. C’est ainsi que dans des conditions où il semblait impossible que les résultats ne fussent pas identiques, on obtenait souvent, de façon brusque, des résultats tout à fait discordans. La cause de cet incident fut cherchée un peu partout, et d’abord, là surtout où elle n’existait pas ; mais elle finit par se découvrir. La variabilité des résultats, dans les cas dont il s’agit, dépendait de la façon dont l’air était filtré. Le faisait-on passer rapidement à travers le tampon ouaté faisant office de filtre, l’air conservait des poussières, et la filtration était insuffisante, d’où un nombre de gouttelettes plus considérable qu’il ne convenait. Il faut filtrer lentement, très lentement même, pour obtenir un air absolument pur, et il faut toujours vérifier la pureté de ce dernier au moyen d’une expansion préalable, ou même de plusieurs. Voici, en effet, de l’air que l’on est en droit de croire pur ; il est saturé de vapeur, et si l’on en provoque la sursaturation et le refroidissement par l’expansion du volume du récipient, il se produit pourtant quelques gouttelettes : c’est qu’il restait sans doute quelques poussières. Recommençons l’opération : il ne se produit rien. Recommençons encore, en employant une expansion plus considérable : voici de nouveau des gouttelettes. Qu’est-ce que cela prouve ? Selon M. Aitken, cela montre qu’il restait encore des parcelles, mais des parcelles plus petites que celles qui, lors de la première expansion, servaient de noyau de condensation. Pourtant il survient un moment à partir duquel l’expansion, si forte soit-elle, ne détermine plus de condensation : l’air peut alors être considéré comme privé de poussières, même des plus fines ; les plus grossières ont été entraînées lors des premières expansions faibles ; les dernières expansions, plus fortes, ont déterminé la précipitation des élémens plus fins. Dans cet air, il ne doit donc plus se produire de gouttelettes. Cela est vrai dans une certaine limite, dans certaines conditions qu’il importe de ne pas oublier : une expansion brusque peut, en effet, provoquer une précipitation de gouttelettes, et M. Aitken pense qu’en ce cas il s’opère une condensation sans noyau, sans parcelles de poussière. Bref, il faut opérer avec beaucoup de précaution, avec lenteur en particulier.