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Cette commission se réunit au ministère du commerce, sous la présidence de Tardieu, et élabora le Règlement de police sanitaire maritime du 2 février 1876. Ce document remarquable fut surtout l’œuvre de Fauvel, alors inspecteur-général de ce service. Il porte l’empreinte de son esprit ferme et lucide et de son expérience approfondie du sujet.

Le règlement de 1876, qui est toujours en vigueur, prévoit, dans ses 130 articles, tous les cas qui peuvent se présenter. Tout en maintenant les garanties indispensables à la santé publique, il a fait disparaître les mesures vexatoires et souvent ridicules contre lesquelles le commerce protestait avec énergie ; il a substitué une législation claire, complète, commune à tous les pays, à la confusion des règlemens antérieurs.

L’administration sanitaire avait, de son côté, perfectionné et développé ses établissemens. Aux lazarets de Marseille et de Toulon qui suffisaient au temps où les provenances du Levant et la peste attiraient toute l’attention, étaient venus se joindre ceux de Pauillac et de Saint-Nazaire, placés à l’embouchure des deux grands fleuves qui se jettent dans l’Océan et destinés à recevoir les navires de toute provenance qui pouvaient introduire en France la fièvre jaune ou le choléra. Ces grands établissemens sanitaires ne ressemblent en rien à ceux du passé. Ils réunissent toutes les conditions de salubrité et de bien-être désirables et permettent l’isolement des différentes catégories de passagers.

Les efforts de conciliation auxquels les conférences internationales avaient donné lieu n’avaient pas été complètement inutiles. Ils avaient abouti à la création du Conseil supérieur de santé de l’empire ottoman et du Conseil sanitaire maritime et quarantenaire d’Egypte. Tous deux avaient le caractère international et admettaient dans leur sein les représentans des nations intéressées aux questions qui devaient s’y traiter. Le second, particulièrement affecté à la défense de la Mer-Rouge, fut créé par un décret du khédive, en date du 3 janvier 1881, et remplaça l’intendance générale sanitaire d’Egypte, fondée par Méhémet-Ali, en 1831[1]. Il admettait, comme celui de Constantinople, les délégués des puissances européennes avec voix délibérative et les médecins sanitaires de ces mêmes puissances, mais avec voix consultative seulement.

Ce conseil, placé sur la route des épidémies de choléra, constituait l’avant-garde de la prophylaxie sanitaire européenne. Il avait des pouvoirs très étendus, une grande indépendance. Il percevait

  1. Le texte de ce décret est reproduit in extenso dans le Recueil des travaux du Comité consultatif d’hygiène publique de France, 1883, t. XI, p. 16.