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une dépense de forces plus considérable que ce qu’on appelle hard-riding, et il a ce grand avantage qu’il ne ruine pas les chevaux et qu’il instruit les cavaliers. Ce qui ne veut pas dire que le travail du dehors aux allures rapides, les sauts d’obstacles, etc., doivent être négligés ; loin de là. Mais il ne faut rien exagérer.

Je ne sais exactement où en est l’équitation dans les écoles d’Allemagne, d’Autriche, d’Italie. Je crois cependant que la nôtre vaut mieux. Mais je sais que, dans un petit pays voisin, qui nous est très sympathique et qui depuis quelque temps nous montre souvent le chemin dans les questions d’art, en Belgique, l’enseignement équestre est devenu très remarquable. À l’école de cavalerie d’Ypres, qui d’ailleurs est plus spécialement une école d’équitation, les terrains, les bâtimens, les chevaux, sont loin de valoir ceux de notre école de Saumur ; mais MM. les écuyers étudient beaucoup, théoriquement et pratiquement, toutes les méthodes, aussi bien celles des Allemands, des Italiens que les nôtres, auxquelles ils donnent la préférence ; ils suivent eux-mêmes une méthode excellente qui vient d’être publiée sous le titre : Dressage des chevaux de troupe, et qui est celle de Versailles modifiée et appropriée aux besoins de notre époque. Les leçons sont données aux élèves avec beaucoup de soin. J’ai pu constater, avec un vif plaisir comme artiste, avec un grand regret comme patriote, la supériorité de cet enseignement sur celui de Saumur : la tenue des cavaliers, le port de l’étrier sont uniformément les mêmes ; les moyens de conduite sont parfaitement corrects et réglés d’après les récentes découvertes dont j’ai parlé plus haut ; la tenue des rênes à la française est la seule adoptée, tandis que chez nous on préfère la tenue à l’allemande ou à l’anglaise. De tout cela il résulte que les chevaux, quoique d’origine plus commune, sont réguliers, cadencés dans leurs exercices de manège, s’allongent dehors selon la vitesse des allures et, malgré un travail considérable, se conservent parfaitement dans leurs membres.


IV

Certes on ne saurait contester la haute supériorité de l’école de Saumur, dont l’organisation militaire me paraît admirable. Plus que tout autre, j’ai le respect de cette grande et belle institution équestre, la seule qui rappelle encore le souvenir du passé. Cependant je n’hésite pas à dire que l’enseignement de l’équitation n’y est pas aussi parfait qu’on le croit généralement. D’autre part, il est visible que notre école de cavalerie ne suffit pas à ranimer dans notre pays le goût du cheval. Il y a bien à Paris et dans quelques villes de province de très bonnes écoles d’équitation et de