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des bancs, en quelque sorte, qui deviennent des obstacles croissons à la libre circulation des eaux. La nécessité de curages fréquens s’impose, entraînant alors l’obligation de donner aux égouts des dimensions suffisantes pour le passage des ouvriers chargés de ce travail.

On était encore conduit à cette même conséquence par le désir, nourri au début du projet, d’utiliser le branchement particulier lui-même, pour l’enlèvement discret et dissimulé de certains récipiens, et en particulier, de ces écœurantes ordures qui, à cette époque, dès la nuit venue, s’entassaient, répugnantes et fétides, devant chaque porte. Une modeste et utile réforme, trop critiquée au début, a depuis quelques années heureusement atténué ce qui était plus qu’un désagrément. La boîte quotidienne, qu’aujourd’hui le passant matinal frôle en se détournant, conserve pour l’histoire le nom de l’administrateur bien avisé qui en prescrivit l’emploi. C’était déjà à une mesure d’un genre comparable que le préfet Rambuteau devait l’immortalité. La gloire pousse sur tous les terrains : elle n’a pas plus d’odeur que l’argent de l’empereur Claude. C’est un service, digne de souvenir, que d’avoir protégé la décence et la propreté des rues, amélioré en quelque chose la salubrité de la ville, et, qui sait ? prolongé peut-être, ne fût-ce que de quelques minutes, la durée de la vie moyenne.

On avait renoncé, il est vrai, avant même de l’avoir essayé, à faire toutes ces manipulations par le branchement particulier. Celui-ci, cependant, n’en a pas moins conservé ses dimensions. L’égout primaire, dans lequel il débouche, est, comme lui, assez haut et assez large pour donner passage aux ouvriers. Il en faut, en effet, nous l’avons dit, pour le curage, et il en faut un grand nombre. Il en faut encore pour poser, vérifier, entretenir et les conduites d’eau, et les fils des télégraphes et ceux des téléphones, et les tubes pneumatiques de l’administration des postes, qui ont trouvé logement dans ces larges galeries. Celles-ci sont ainsi devenues de véritables voies souterraines, où circule à l’aise un peuple actif et nombreux.

Rendues aptes à tant d’emplois, sont-ce cependant encore des égouts ? Oui, sans doute.

Leur partie inférieure est toujours la cunette où se déversent les liquides impurs de la voie publique et des habitations. Mais, commandées par celles de l’ouvrage principal, les dimensions des cunettes sont excessives. Les plus étroites, — celles des égouts primaires, — ont au moins 0m,40 de large et 0m,20 de creux. Les quelques litres d’eau ménagère qui, de temps à autre, y sont projetés, ne peuvent les remplir. Ils s’y étalent en une couche mince, dont la vitesse se transforme en un lent ruissellement, impuissant