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de la vie chez ceux des germes morbides que l’homme a, le plus, à redouter. S’ils ne sont pas détruits, ils seront certainement atténués. Qui sait même si, la salutaire action se prolongeant, de virus ils ne vont pas devenir vaccins ?

Les précautions à prendre s’indiquent d’elles-mêmes : diluer le plus possible, répandre sur des surfaces étendues et bien perméables les eaux à épurer, maintenir enfin la faculté épuratrice du sol en lui enlevant par la végétation les matières fertilisantes qu’on y accumule. À ces conditions, nul danger. M. Pasteur lui-même l’a déclaré, en 1885, à la commission de la chambre des députés où s’agitait la question[1].


V

Ces considérations doivent dominer, et de beaucoup, les conclusions tirées d’expériences de laboratoire, plutôt faites en vue de la recherche scientifique que de l’application pratique. Le docteur Frankland, qui a été l’agent actif de l’assainissement de l’Angleterre, avait trouvé qu’un mètre cube de sable épurait en un jour 25 litres du sewage de Londres. On en concluait qu’un sol de 2 mètres de profondeur pouvait recevoir quotidiennement 50 litres de sewage par mètre superficiel, soit sur un hectare en un an une couche d’eau de 18 mètres ; avec un sol perméable jusqu’à, la profondeur de 3 mètres, la couche d’eau possible aurait donc été de 27 mètres. Certaines expériences ont été suivies, pendant quelque temps, à Clichy et à Gennevilliers, qui ont donné des résultats comparables à ceux de Frankland. On a eu probablement le désir, après tout fort explicable, par une pensée naturelle d’économie, d’y trouver la démonstration qu’avec de très petites surfaces on pourrait épurer la masse d’eau que vomit l’égout. Il a fallu battre en retraite devant l’émotion, instinctive peut-être, mais très juste, de l’opinion. On a aujourd’hui des prétentions beaucoup plus modestes.

Le docteur Frankland a d’ailleurs été le premier à le déclarer : « Quand on transporte dans la pratique un résultat acquis dans le laboratoire, il faut toujours se rappeler que l’application en grand ne saurait réaliser les conditions qu’il est facile d’observer dans l’expérience en petit. » C’est là une observation commune à tous les genres de recherches : elle est de mise ici, encore plus qu’ailleurs, en raison même de la disproportion qui existe entre le tube de verre de 25 à 30 centimètres de diamètre dans

  1. Voyez le rapport de M. le docteur Bourneville, député. (Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 1886 de la chambre des députés, p. 97.)