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précisément parce que cette transformation est lente que l’emploi des engrais azotés est nécessaire, qu’il nous faut ajouter à nos sols riches en azote du sulfate d’ammoniaque ou du nitrate de soude.

Les nécessités des semailles et des récoltes nous forcent d’accumuler sur le même sol un grand nombre d’individus de la même espèce végétale ; semés le même jour, ils atteignent ensemble chacune des phases de leur développement ; tous ont, à la fois, les mêmes exigences ; or les transformations de l’humus ne sont pas assez rapides, ne se produisent pas assez complètement en temps opportun, pour suffire à ces exigences, et nous sommes obligés pour les satisfaire d’acquérir des engrais azotés. Ils ne sont nécessaires que parce que nous ne savons pas amener au printemps et au commencement de l’été l’azote de l’humus à prendre les formes sous lesquelles il est assimilé, utilisé par les végétaux ; ces transformations se produisent sous l’influence des fermens du sol. Il nous faut donc connaître, d’une part, les formes sous lesquelles les plantes assimilent l’azote, et de l’autre, suivre l’action des fermens travaillant sur l’humus et rendant solubles, assimilables, les élémens qu’il renferme.


III

S’il existe des végétaux de grande culture, notamment tout le grand groupe des céréales, qui acquièrent un développement complet quand ils sont enracinés dans des sols pauvres en matières organiques, mais amplement fournis d’alimens minéraux, de nitrates ou de sels ammoniacaux, il en est d’autres qui ne paraissent prospérer que lorsque leurs racines rencontrent certaines matières organiques assimilables, dérivées de l’humus, matières complexes, difficiles à étudier et encore mal définies.

Sans parler des plantes à terre de bruyère, qui font l’ornement de nos jardins, en laissant de côté les azalées, les rhododendrons, les hortensias, etc., pour nous restreindre aux végétaux exploités par les cultivateurs, nous trouvons une profonde différence d’alimentation entre les céréales et les légumineuses.

On sait depuis longtemps qu’il est impossible de maintenir le trèfle, la luzerne ou le sainfoin indéfiniment sur le même sol comme on y maintient du blé, de l’avoine ou de l’orge ; à cette notion courante parmi les cultivateurs, MM. Lawes et Gilbert ont ajouté à Rothamsted une démonstration éclatante. Tandis que depuis cinquante ans (la première récolte date en effet de 1844), ils sèment sur le même champ du blé et que les parcelles qui reçoivent des engrais salins : nitrate ou sels ammoniacaux, superphosphates et