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facultés intellectuelles, et qui gardait le souvenir le plus net, le plus précis, des choses et des hommes sur lesquels je désirais le consulter. Interrogé par moi sur l’origine et la composition des Mémoires, sur Barras lui-même, dont il avait été le fidèle ami, M. Paul Grand me donna avec beaucoup de bonne grâce tous les renseignemens que je lui demandais. Il m’affirma qu’il existait à la mort de Barras de véritables Mémoires, œuvre de l’ancien directeur lui-même, dictés ou même rédigés de sa main par fragmens. On remarquera que cette affirmation est tout à fait conforme à celle que M. Paul Grand avait exprimée plus de cinquante ans auparavant, dans les documens que j’ai cités plus haut, et que je ne connaissais pas encore au moment où j’eus l’honneur de me présenter à lui.

Si ce témoignage ne semblait pas suffisant, j’en pourrais citer d’autres. J’ai sous les yeux une lettre adressée à M. Rousselin de Saint-Albin par Mme la comtesse de Pelet, née Thermidor Tallien, à la date du 12 juin 1829 : « Mon père, dit-elle, avait confié à M. Barras des notes importantes sur les événemens dont tous deux avaient été les spectateurs ou auxquels ils avaient pris part. Ces notes, de la main de mon père, avaient été remises à M. Barras pour qu’il y puisât des renseignemens que la rédaction de ses mémoires lui rendait fort utiles… etc. »

Lettre autographe de Barras lui-même à M. de Saint-Albin, sans date : « Bonjour, mon cher Alexandre. Je vous adresse le manuscrit et les notes que j’ai dictées à la hâte. Vous les rectifierés et les rédigerés avant de vous en servir ; vous recevrés aussi les deux volumes de Napoléon[1], renfermant d’impudens mensonges et la servilité de ses valets… »

Lettre du 30 août 1830, adressée au même par Courtot : «… Je viens vous engager à faire paraître les mémoires, tels qu’ils sont sortis de la bouche de l’auteur, sauf les modifications que vous jugerez convenables dans le style… » Autre lettre du même au même, en date du 19 septembre 1831 : «… Il me semble que le moment serait arrivé de nous occuper de la publication des mémoires du malheureux général… Je pense qu’aucune considération particulière ne peut porter obstacle à l’impression d’un ouvrage aussi piquant… Les Mémoires du général seront un monument historique où tout le monde viendra puiser les renseignemens et les faits de la Révolution… »

Lettre du sieur Abeille, maire de la commune d’Ampus (Var), à M. Rousselin de Saint-Albin, en date du 5 novembre 1830 :

  1. La Suite au Mémorial de Sainte-Hélène, sans doute, par Grille et Musset-Pathay. Paris, 1824, 2 vol. in-8o.