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LA JEUNE
LITTERATURE ALLEMANDE

GERHART HAUPTMANN

Les discussions esthétiques et sociales qui se sont engagées autour des pièces de M. Gerhart Hauptmann ont presque abouti à faire de lui une personnalité de premier plan. Ayant été interdits à Berlin, ses Tisserands, désignés de ce chef à l’attention de M. Antoine, ont été accueillis au Théâtre-Libre avec l’enthousiasme sur lequel peuvent compter les œuvres proscrites par la censure, quelles qu’elles soient. Les Ames solitaires, que l’ « Œuvre » voulut ensuite nous présenter, avaient été jouées librement à Berlin ; elles eurent la bonne fortune d’être à leur tour interdites à Paris : soit parce que leur traducteur, M. Cohen, venait d’être expulsé du territoire français comme anarchiste, soit parce que la censure y découvrit, — ce qui eût été d’ailleurs une lourde erreur, — des tendances anarchistes. Jouées une seule fois, en répétition générale, devant des initiés, les Ames solitaires n’en passèrent que plus facilement pour un chef-d’œuvre ; la gloire d’être interdit à Paris s’a joutant à celle d’avoir été interdit à Berlin, M. Hauptmann fut consacré grand homme dans plusieurs cénacles, et put passer pour un esprit d’une extrême hardiesse. Aussi ce fut avec une curiosité très vive qu’on attendit, il y a quelques semaines, la représentation de son œuvre la plus nouvelle, l’Ascension de Hannele Mattern, que les grandes scènes de l’Allemagne et de l’Autriche donnaient déjà avec succès. Cette représentation partagea la critique, comme aussi le public spécial du