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équivalant à celui d’écuyer, étaient revenus à l’équitation instinctive, sans règles ni principes.

En France l’enseignement de l’école de Saumur devait nécessairement se ressentir du désaccord qui régnait entre tous les maîtres[1] et aussi des progrès que firent bientôt chez nous les modes anglaises, particulièrement pour tout ce qui avait rapport aux choses hippiques ; les écuyers civils blâmèrent toujours cet engouement, auquel ils donnèrent le nom d’anglomanie.

Ducroc de Chabannes et Cordier, le premier élève de l’Ecole militaire, le second élève de l’Ecole de Versailles, tous deux premiers écuyers à Saumur, ne firent rien pour s’entendre et s’inspirèrent toujours d’un parti pris de contradiction. L’ouvrage qu’a laissé Cordier, plus savant que celui de Ducroc de Chabannes, est tellement surchargé de détails et de controverses qu’il en perd beaucoup de sa valeur au point de vue de l’application.

Le comte d’Aure, merveilleux praticien et excellent professeur, comprit admirablement et démontra par son exemple comment devaient se concilier les différentes Ecoles. Il est certainement le plus parfait écuyer que nous ayons eu depuis La Guérinière. Il laissa un excellent Cours d’Equitation, celui qui fut adopté officiellement et enseigné à l’Ecole de cavalerie et dans les corps de troupes à cheval par décision de M. le Ministre de la guerre en date du 9 avril 1853. Les quelques pages qui dans ce livre sont consacrées à l’éducation et au dressage du cheval ne contiennent toutefois rien de nouveau.

C’est alors que parut Baucher, qui se posa en réformateur. Baucher, dont l’habileté comme écuyer de cirque n’a jamais été contestée par personne, obtenait de ses chevaux un travail très compliqué, exécuté avec une grande justesse. Il eut le tort de croire que cela l’autorisait à vulgariser les moyens qu’il employait. Il écrivit plusieurs ouvrages dans lesquels il exposa sa méthode, affirmant même, comme autrefois Newcastle, qu’elle était la seule bonne et qu’il fallait l’appliquer à tous les chevaux. Je ferai d’abord remarquer que, si le travail du manège est indispensable à tout cheval de selle, il n’en est pas de même du travail de cirque qui n’a aucune utilité pratique. On dit d’ailleurs à ce sujet que Baucher eût été incapable de tirer un bon parti d’un cheval à l’extérieur. N’ayant en vue que les acrobaties équestres, il prétendit « détruire les forces instinctives pour les remplacer par les forces transmises, assouplir isolément chaque partie du corps au moyen de toutes sortes de flexions. » Les piliers, le travail à la longe, n’existent plus. Le cheval ayant dès les premières leçons

  1. Voyez la Revue du 1er octobre 1892 (l’Enseignement de l’Equitation en France).