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missionnaires, les propriétaires devaient obtenir, avant de signer le contrat, l’autorisation des autorités locales. C’était retirer d’une main, ce qu’on donnait de l’autre. Le droit d’achat que la convention Berthemy semblait avoir assuré aux missions se trouvait soumis, en fait, à l’accomplissement d’une clause qui le rendait illusoire, car les autorités locales n’accordaient presque jamais l’autorisation indispensable. A plusieurs reprises et notamment en 1882, nos agens en Chine ont fait de grands efforts pour modifier les traditions suivies par les autorités locales ! ces efforts sont alors restés vains. Notre ministre actuel, M. Gérard, a imité ses devanciers ; il a renouvelé leurs tentatives et, finalement, il a été plus heureux. Le retour au pouvoir du prince Kong, qui avait négocié en 1865 avec M. Berthemy, lui a facilité sa tâche. Il a demandé au prince de revenir purement et simplement au texte qu’il avait rédigé ou consenti lui-même, il y a trente ans ; mais il fallait aussi faire accepter cette solution par le Tsong-li-yamen, et c’est à quoi il s’est appliqué avec succès. Le gouvernement chinois, au bout de six mois de négociation, a renoncé à exiger l’autorisation préalable, et de nouvelles instructions, destinées aux fonctionnaires de l’empire, ont été rédigées dans le sens convenu avec M. Gérard, auquel le texte en a été communiqué. M. Gérard a communiqué à son tour à nos consuls en Chine la correspondance échangée entre le Tsong-li-yamen et lui, afin de les mettre mieux en mesure de veiller à la stricte observation du nouvel arrangement. La convention Berthemy, rétablie dans son texte primitif, devient donc la charte des missions en ce qui concerne l’exercice du droit qui leur est reconnu d’acheter des maisons et des terres. Les achats, pour être valables, devront être seulement soumis à la formalité générale de l’enregistrement. C’est là un succès qui fait honneur à notre diplomatie, et dont les missions en Chine sauront tirer de grands avantages. Quant à la France, elle aura rempli, une fois de plus, d’une manière efficace, son rôle de protectrice des catholiques en extrême-Orient.


FRANCIS CHARMES.

Le Directeur-gérant, F. BRUNETIÈRE.