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ou cinq descendans des anciennes familles de daïmio. Quant aux anciens eta, qui constituaient avant la révolution une véritable classe de parias, ils ont conquis l’égalité devant l’opinion comme devant la loi.

La nouvelle organisation administrative se complète et se perfectionne. Le Japon a maintenant ses préfets et ses sous-préfets, un Conseil d’Etat, et une Cour des comptes qui applique en général nos règlemens sur la comptabilité publique. Depuis quinze ans, ces rouages fonctionnent régulièrement. On ne soutient plus guère maintenant que les finances japonaises soient dans un état déplorable. On pouvait le croire vers 1880, quand les importations dépassaient de beaucoup les exportations et que le papier-monnaie baissait à mesure que se multipliaient les émissions. Mais aujourd’hui le papier, remboursable à caisse ouverte, comme nos billets de Banque, est au pair; l’argent a reparu dans la circulation; les exportations, depuis plus de dix ans déjà, excèdent les importations ; le gouvernement, qui empruntait à 10 pour 100, trouve depuis dix ans des capitaux à 5 pour 100 et au-dessous; la dette publique est modeste, et tous les budgets se soldent par des excédens. Enfin l’indemnité chinoise va remplir le trésor.

Avant 1890, c’est-à-dire avant la création des deux Chambres, l’administration financière se contrôlait elle-même. On l’accusait d’avoir en réserve des quantités formidables de papier et de les répandre secrètement (accusation d’ailleurs contraire aux données de la science économique). On déclarait faux les états de recettes et de dépenses qu’elle publiait. Ne discutons pas le passé. La confiance naît de la publicité. Le Japon recueillera les bénéfices de son nouveau régime.


VII

Ces réformes dans la législation et dans l’organisation politique du Japon ont-elles entraîné une transformation morale ? Si les lois, notamment les lois civiles et pénales d’un pays, peuvent influer sur l’état moral de ses habitans, ce qu’il est difficile de nier, il faut convenir que le Japon a fait, depuis 1880 surtout, plusieurs pas dans la voie du progrès.

Les statistiques ne permettent pas d’affirmer qu’il y ait amélioration de la moralité des populations. Le nombre des grands crimes est en décroissance. Mais celui des délits a augmenté. Toutefois il faut tenir compte des perfectionnemens apportés aux moyens de répression. Aussi ne saurions-nous accepter sans réserves