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conventions contraires à tous les principes de notre droit que si nous sommes simplement les protecteurs des Hovas qui, en pleine connaissance de cause, ont conclu ces conventions. Mais n’y eut-il que ce fait, celui-ci incontestable, qu’en déclarant Madagascar possession française nous assurons aux produits français dans l’île l’immunité de tous droits, cette seule considération suffit pour démontrer que Madagascar doit être proclamée possession française. Ainsi il est impossible de s’en tenir au traité. Convient-il maintenant de l’amender ? On le pourrait, certes, et il n’en résulterait, suivant toutes les probabilités, aucun inconvénient matériel. La reine a signé l’acte qu’on lui a présenté, après l’épuisement de ses forces et dans l’impossibilité de toute résistance ; elle et son gouvernement étaient et sont encore dans nos mains. Elle eût signé et elle signerait encore tout autre acte qui lui conserverait ses honneurs, ses dignités, qui lui assurerait les moyens de tenir son rang, et qui ferait aux autorités malgaches une large part de collaboration dans l’administration intérieure de l’île. A vrai dire, les remaniemens à apporter à la convention conclue entre la reine et la France importeraient fort peu à la reine, puisqu’ils ne changeraient rien d’essentiel à sa situation ; qu’ils laisseraient subsister, suivant l’heureuse distinction de M. Le Myre de Vilers, le protectorat administratif ; et se contenteraient de substituer notre souveraineté, au point de vue diplomatique, à un indécis et obscur protectorat politique. On pourrait donc parfaitement amender la convention passée avec les Hovas sans qu’il en résultât rien de fâcheux.

Si l’on éprouve, cependant, quelque scrupule à le faire, il s’offre un autre moyen tout simple de trancher la question. Il suffit de considérer le traité comme une convention concernant uniquement le régime intérieur de l’île, à ne pas le communiquer aux puissances, à faire émettre par les Chambres la déclaration que Madagascar est possession française et à ne porter à la connaissance des puissances que cette seule déclaration. Le gouvernement saisirait le Parlement d’un projet de loi dans l’exposé duquel serait relaté le traité malgache et qui se terminerait par ce dispositif : le gouvernement français, approuvant les conventions passées avec la reine de Madagascar pour l’administration intérieure de cette île, déclare Madagascar possession française. Ainsi, tous les élémens du problème seraient résolus ; Madagascar serait, au point de vue politique et diplomatique, une possession française pure et simple ; d’un autre côté, pour l’administration intérieure, toutes les clauses du traité seraient observées, et c’est ce qui importe à la reine et aux Malgaches. Cette solution est la