Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 132.djvu/935

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

partie pris sur la lecture, — n’est sans doute pas non plus étrangère à cette diminution. Mais si la qualité des ouvrages de vulgarisation à bon marché d’aujourd’hui a remplacé la qualité des publications rares d’autrefois, quelques-unes encore font honneur à leurs éditeurs qui ont conservé la tradition du beau. De ce nombre, quel plus magnifique spécimen pourrait-on citer que la Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, dont la confection dénote un soin infini, qui ne sera terminée que dans plusieurs mois, qui méritera alors une étude toute spéciale et que l’on ne saurait comprendre dans la masse des livres d’étrennes, mais dont on peut bien parler ici pour préciser et caractériser tous les progrès dans les procédés qui servent à l’illustration et à la composition du livre moderne ! Qui n’a pu voir exposés au Champ-de-Mars, — d’abord au Salon annuel, puis à l’Exposition récente de la lithographie, — l’original et la copie des trois cent soixante-cinq aquarelles que M. James Tissot a composées d’après les quatre Évangiles, ressuscitant avec les yeux de la foi, dans son pèlerinage de dix ans au pays sacré de Gàlil, jusqu’à la trace du Christ ! Ces scènes de l’Évangile, de l’enfance de Jésus, de la Passion et du Calvaire sont si merveilleusement reproduites que la fraîcheur de leurs tons ne paraît pas avoir varié sous la presse. La plupart des planches donnent en effet l’illusion de l’aquarelle ; par l’harmonie des couleurs, l’observation de leur valeur relative et de la dégradation des plans, les copies sont aussi près que possible de la perfection, et de l’original. Quand l’œuvre sera achevée par la maison Marne, elle restera comme une des merveilles de l’iconographie chrétienne et de la miniature industrielle — sans qu’on puisse toutefois établir de comparaison avec les précieux et uniques manuscrits, dont la dorure seule coûtait quelquefois plus d’un millier de francs, exécutés entièrement à la main par les peintres miniaturistes du moyen âge et de la Renaissance, tels que Fra Angelico ou Jehan Foucquet.

Que de livres profonds ou magnifiques n’ont-ils pas été déjà écrits sur la Terre-Sainte ; et ne semble-t-il point que le siècle finissant soit marqué par un retour au christianisme des premiers âges, que, dans l’angoisse sombre d’à présent, l’humanité aspire à se retremper aux sources pures de la foi primitive ? « Après la Vie du Christ, quelle plus belle histoire que celle de son enseignement, propagé par l’Église, qui a suffi à régir le monde pendant dix-neuf siècles avec ce seul précepte : Aimez-vous les uns les autres ? » La France Chrétienne[1], que la maison Didot nous présente sous les auspices du cardinal Langénieux, archevêque de Reims, est le pendant du bel ouvrage sur le Vatican[2] qu’elle a fait paraître l’an passé pour célébrer la papauté à travers les siècles et montrer dans sa splendeur le Vatican. On y voit revivre, sous

  1. La France chrétienne dans l’histoire, 1 vol. in-4o illustré ; Firmin Didot.
  2. Le Vatican, les Papes, la Civilisation, 1 vol. in-4o, avec gravures ; Firmin Didot.