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Meyerbeer m’a bien recommandé de tenir secret l’achat de cinquante exemplaires. J’avais oublié de vous le dire. Cela à cause des autres auteurs.

Ne serait-il pas à propos d’ajouter à la fin du volume la table de tous les auteurs, compositeurs et acteurs dont il est fait mention, avec désignation des pages ? Il me semble que cela pourrait aller.

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Cette lettre est écrite de Montreuil-sous-Bois, où d’Ortigue s’était retiré pour vivre à meilleur marché. La suivante, de trois mois postérieure, fut expédiée de son village natal, de Cavaillon (Vaucluse), où sa famille l’avait rappelé :


18 avril 1831.

Me voici, mon cher éditeur, à deux cents lieues de Paris. Il m’a fallu obéir aux ordres de ma mère qui a craint que je ne fisse connaissance avec le choléra. Bref, me voilà ici, disposé à aller vous rejoindre dès que vous ne serez plus en aussi mauvaise compagnie. Je passai chez vous le samedi 7 avril, veille de mon départ. Je suis maintenant tout consolé du retard de notre publication. Je n’ai pas la moindre envie de lutter de renommée avec le choléra. Autant donc que je puis l’entrevoir, notre affaire est remise aux approches de l’hiver ou à l’automne. Nous ferons suivre alors le Balcon et la Sainte-Baume. Pour ce dernier ouvrage, je profiterai de mon séjour en Provence pour aller faire un voyage sur les lieux quand il sera terminé ; la partie historique et pittoresque y gagnera en exactitude. Ce sera toujours un ouvrage de conscience, bon ou mauvais.

Nos conventions avec Meyerbeer tiennent toujours. Mais je prévois des difficultés de la part de mes parens. Lorsqu’il sera temps de retourner à Paris, ils iront me chercher mille prétextes pour m’empêcher de partir. Je voudrais que vous m’écrivissiez une simple lettre, dans laquelle vous me parlerez de nos engagemens relativement aux deux ouvrages ci-dessus. Non pas, remarquez bien, que j’aie besoin d’une garantie personnelle contre vous, mais pour avoir un motif aux yeux de ma famille. C’est en ce sens que j’en ai parlé à Victor Hugo. Je ne sais s’il vous l’a dit. Ainsi, écrivez-moi un mot à ce sujet. Encore une fois, ce n’est pas une garantie, c’est un service d’ami que je vous demande, et, à ce titre, vous ne me le refuserez pas.

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Vous pouvez ajouter, si vous voulez, à votre bulletin d’annonces, un ouvrage historique et philosophique sur la musique dont le titre sera : De l’Orgue, par M. J. d’Ortigue, 2 vol. in-8o. C’est Hugo qui a trouvé ce titre, et c’est tout dire. Cet ouvrage est fait en partie.

Adieu, mon cher éditeur, j’attends aussi la suite de Nodier.

Tout à vous de tout mon cœur.

J. D’ORTIGUE.


Que d’illusions juvéniles en ces quelques lignes ! Non seulement les ouvrages convenus ne parurent qu’après deux ou trois ans d’attente ; mais ce dernier travail, si pompeusement annoncé sous le parrainage d’Hugo, ne vit jamais le jour. Encore un ouvrage à joindre à la liste déjà longue des œuvres promises avec