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chaque couple une petite habitation distincte, une case, où il fera son nid et élèvera ses petits. Le pigeonnier est pourvu d’une entrée unique constituée par une cage, qui présente deux issues donnant l’une sur l’extérieur, l’autre sur le colombier. Les deux portes sont fermées par de petites tringles verticales, mobiles autour du point de suspension et appelées cliquettes. La cage, qui est en quelque sorte l’antichambre du colombier, permet d’isoler les pigeons arrivant de l’extérieur, porteurs de dépêches. On ferme la cage aux sortans et on la laissé ouverte aux entrans en disposant deux réglettes en travers des cliquettes. Le pigeon arrivant du dehors pousse avec la tête les cliquettes de la première porte, entre dans la cage qu’il traverse, puis essaie de pousser de même les cliquettes de la deuxième porte, mais celle-ci est fermée. Il reste donc pris dans une sorte de souricière jusqu’à ce que son maître vienne le délivrer.

Le dressage des pigeonneaux commence dès qu’ils ont de trois à quatre mois ; on les lâche à des distances de plus en plus grandes : l, 3, 10, 20, 30, 50, 90, 120 kilomètres, en choisissant ces étapes successives sur une même direction. A 6 mois, un pigeonneau doit être en état de rentrer au colombier en parcourant 300 kilomètres à la vitesse de 80 kilomètres à l’heure. A la fin de la deuxième année d’entraînement, les pigeons devront revenir de 500 kilomètres, et la troisième année, de 1 000 kilomètres. Ces épreuves successives ont pour résultat de sélectionner les habitans d’un colombier ; les sujets de valeur médiocre se perdent en effet en route.

Le pigeon revient beaucoup plus rapidement des localités situées sur la direction dans laquelle il a été entraîné ; mais, quand il est de bonne race, il revient d’une direction quelconque. Il serait logique d’entraîner tous les habitans d’un colombier dans des directions différentes. Cette manière de procéder occasionnerait assurément des pertes plus nombreuses, mais les pigeons restant après ces différentes épreuves auraient évidemment une plus grande valeur. L’entraînement dans une direction unique est pratiqué par la plupart des colombophiles : en spécialisant de la sorte leurs pigeons, ils ont un double but : limiter les pertes et obtenir sur une direction, toujours la même, une orientation plus rapide, un retour plus prompt au colombier. Le colombophile ne vise pas actuellement un résultat pratique, l’emploi de ses pigeons pour la correspondance dans des circonstances forcément variées ; il cherche simplement à obtenir des succès dans les concours, et ceux-ci ont généralement lieu pour une même ville dans une direction invariable connue d’avance. A quoi bon, dans ces conditions, entraîner les pigeons sur d’autres directions ?