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bien le moyen le plus économique et le plus rationnel d’y arriver. On peut discuter longuement la question de savoir lequel, de la navigation ou du chemin de fer, donne le prix de revient le plus bas ; ce qui n’est pas douteux, c’est que, pour des transports comparables, faits par bateaux ou par trains complets, sur des voies à très bon profil, avec des délais assez longs. le coût du transport proprement dit, par les deux voies, ne diffère guère ; l’écart des prix tient presque exclusivement à l’élément péage, ou rémunération du capital d’établissement, qui entre dans les tarifs de chemins de fer, et qui n’existe pas sur les voies navigables. Si, donc, les pouvoirs publics reconnaissent l’utilité d’abaisser exceptionnellement, sur une direction privilégiée, le coût du transport des houilles, par exemple, il coûterait moins cher de s’entendre avec les chemins de fer, pour exempter ce transport de tout péage, que de doubler la voie existante d’une voie nouvelle.

Mais, en fait, quand on crée de nouvelles voies navigables, c’est plus encore le trafic des marchandises de valeur moyenne, que celui des marchandises pondéreuses, qui en est atteint, et cela se conçoit facilement. Dans les tarifs du chemin de fer, l’élément péage ne constitue qu’une fraction minime pour les marchandises lourdes, rangées dans les dernières séries de la classification générale ; il représente moitié ou deux tiers du prix total, pour les marchandises de valeur moyenne, blés, vins, fils, etc. ; il en représente les quatre cinquièmes, pour les marchandises de grande valeur. L’avantage offert par sa suppression, sur la voie navigable, est donc d’autant plus grand, qu’il s’agit d’une marchandise rangée dans une classe plus élevée. Si cet avantage ne suffit pas à détourner les produits très chers, pour lesquels le prix de transport n’importe guère, et qui prennent toujours la voie la plus rapide, il n’en est pas de même des marchandises intermédiaires, qui empruntent la voie navigable, dès qu’elle peut offrir des conditions de transport suffisamment régulières.

Ce fait ne se produit guère sur les canaux du Nord, trop encombrés pour laisser place à des services réguliers très accélérés. Mais la Seine, le Rhône, dont les conditions de navigabilité ont été transformées à grands frais, transportent bien plus de vins, de blés, de fils, de papiers. de sucres, que de bouille ou de pierres. La statistique de la navigation met en relief l’action que cette situation a dû exercer sur la garantie d’intérêts. Dans les dix groupes entre lesquels elle répartit les marchandises, on peut former deux grandes catégories : d’un côté, les houilles, bois, minéraux, matériaux de construction ; de l’autre, les produits métallurgiques, industriels. agricoles et alimentaires. De