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LES MONOPOLES INDUSTRIELS
AUX ÉTATS-UNIS

La vie économique subit partout depuis un quart de siècle une transformation intérieure plus ou moins profonde, naturelle et presque inévitable, toujours grave en raison des épreuves qui accompagnent cet âge critique de l’industrie moderne. Pour marquer par deux traits simples les grandes lignes de cette évolution, nous dirons que l’industrie se centralise et que le régime traditionnel de la concurrence tend à faire une place de plus en plus large au principe de l’association en matière économique. Il n’y a pas là un phénomène extraordinaire et accidentel, mais une simple phase d’un lent et long mouvement, aussi ancien que l’industrie elle-même, qui semble porter sans cesse le capital et le travail par une concentration progressive vers l’intégration. La même force qui a remplacé peu à peu, dans l’histoire économique des temps modernes, le petit artisan par l’industriel et l’industriel par la société anonyme, paraît favoriser maintenant la naissance du syndicat de producteurs, c’est-à-dire la coalition de tous les fabricans d’une même denrée dans un État, sur un continent, ou de par le monde entier. C’est à la constitution des grands monopoles industriels que menacent d’aboutir aujourd’hui les nouveaux progrès de la centralisation économique. Dans chaque branche de production nous voyons en effet les grandes entreprises essayer de s’unir, au lieu de se faire la guerre, pour dominer le marché, pour contrôler les prix. Un élément nouveau de l’activité humaine, l’association, s’ajoute à la concurrence et s’efforce de s’y substituer; il semble que ce ne doive plus être le seul jeu de