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contre les efforts à la fois très modérés et très patiens de la politique de la Consulta. On ne pouvait donc nier que le fait seul de la médiation offerte à Léon XIII par l’empereur Guillaume et le roi Alphonse, pour régler la question des Carolines, constituât, au point de vue politique international, un événement considérable, propre à relever dans une large mesure le prestige du Saint-Siège.

À ce titre, l’initiative prise par l’Allemagne ne manqua pas de contrister les conseillers du roi Humbert, le lent et progressif amoindrissement de la papauté n’ayant cessé d’être, pendant les quinze années précédentes, un des principaux objectifs de l’Italie. A Berlin même, naguère, on était allé beaucoup plus loin. En 1875, au plus fort du Culturkampf, le prince de Bismarck, s’appuyant sur une consultation du docteur Bluntschli, avait tenté de faire prévaloir au Quirinal cette idée que, le Pape étant dépossédé de ses Etats, le devoir incombait au roi d’Italie, qui avait succédé au Saint-Père dans l’exercice de ses droits temporels, de veiller à ce que le chef suprême de l’Eglise catholique fût empêché de braver les gouvernemens dont la chancellerie pontificale croyait devoir censurer les actes. Cet étrange programme, qui ne tendait à rien moins qu’à rendre le Souverain Pontife justiciable de la maison de Savoie, n’avait pas été, selon toute vraisemblance, sérieusement discuté à Rome, mais on en avait sans doute gardé assez le souvenir pour ressentir quelque amertume en constatant à quel point les vues du prince de Bismarck s’étaient modifiées au profit du successeur de Pie IX.

En réalité, l’appel de l’Allemagne et de l’Espagne à la médiation du Pape pour régler la question des Carolines était un échec pour l’Italie ; car le gouvernement du roi Humbert avait, dit-on, proposé au cabinet de Madrid ses bons offices à Berlin. Il s’était vu éconduire par M. Canovas ; et il était naturel qu’au Palais apostolique on ne cherchât pas à atténuer l’importance que prenait, dans ces conditions, le rôle déféré au Pape.

En Allemagne, les organes, des partis les plus opposés s’attachaient à déduire les conséquences que devait amener l’incident. Les partisans les plus résolus du Culturkampf semblaient ne concevoir aucune alarme ; tout au contraire, chacun applaudissait à l’initiative hardie qu’avait prise le chancelier de l’Empire avec la promptitude pleine d’espièglerie dont ce puissant homme d’Etat a longtemps aimé à surprendre le monde. Les publicistes de