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indien depuis la plus haute antiquité ; que les Tyriens le visitaient ; et que c’est de là que les anciens importaient en Egypte les clous de girofle, que mentionne Strabon. Comme les Anglais n’ont jamais restitué une seule colonie, on peut douter qu’ils eussent restitué Java s’ils n’avaient été encore dans l’ivresse du triomphe, au lendemain de Waterloo, et pleins de reconnaissance envers la Hollande qui leur avait facilité le succès. Pour une fois que l’Angleterre sut noblement rendre le bien d’autrui, ce fut dans une heure d’oubli.

Comment, depuis lors, les Néerlandais se maintiennent-ils dans l’archipel ? Comment trente mille Européens gouvernent-ils paisiblement vingt-cinq millions de Javanais, qui sont satisfaits de leur sort ? Voilà ce qu’il y a de plus merveilleux à Java, voilà ce qu’il est intéressant d’examiner.

La Hollande n’a point, comme l’Angleterre, de colonies autonomes, ayant leur gouvernement responsable et leur parlement, telles que la colonie du Cap, où les indigènes mêmes ont le droit de vote, et dont les institutions sont fidèlement calquées sur celles de la Grande-Bretagne. Les colonies hollandaises n’ont aucune existence propre : elles sont soumises au contrôle de la mère patrie, et le représentant du Roi y exerce un pouvoir presque omnipotent ; elles réalisent le type de ce que les Anglais appellent Crown Colony ou colonies de la Couronne, pour les distinguer des colonies à self government.

Avant la constitution hollandaise de 1848, c’était le Roi qui avait l’administration exclusive des possessions d’outre-mer ; mais actuellement la loi règle le budget des colonies et les affaires les plus importantes. L’administration des possessions d’outre-mer est exercée au nom du Roi par le ministre des colonies, et chaque année un rapport détaillé est présenté aux États généraux sur la situation coloniale. Le gouvernement des Indes Néerlandaises n’est plus, comme au temps de la fameuse Compagnie des Indes, exercé par un collège, mais repose dans les mains d’un seul homme, mandataire du Roi, et responsable envers lui de l’exercice de son mandat ; responsabilité qui trouve sa sanction dans la faculté accordée au Roi et à la Seconde Chambre des États généraux de le mettre en accusation. Ce mandataire du Roi porte le titre de gouverneur général. Il est le chef des armées de terre et de mer des Indes Néerlandaises ; il exerce son contrôle suprême sur les différentes branches de l’administration générale ; il rend