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actions et obligations de chemins de fer semblaient seules devoir faire exception à cette règle, et encore les rapports intimes, qui existent presque partout entre ces entreprises et le Trésor public, faisaient-ils souvent apparaître ces titres comme une variante des fonds d’État plutôt que comme ceux de véritables industries particulières. En Allemagne, au contraire, les financiers ont compris les devoirs que leur impose la baisse de plus en plus rapide de l’intérêt attaché aux titres de rente de premier ordre. Aussi longtemps que ceux-ci rapportaient i pour 100, et davantage, à leurs détenteurs, le banquier pouvait se contenter de ce revenu pour rémunérer en partie les capitaux qu’il gère à titre temporaire ou permanent. L’escompte de papier, à des taux bien plus élevés que la moyenne de ceux qui se pratiquent maintenant, complétait ces emplois. Mais, aujourd’hui que le revenu de 3 pour 100 commence à être un maximum pour les rentes des pays les plus avancés, et qu’il faut entrevoir 2 et demi comme produit des capitaux placés en ce qu’on nomme valeurs de père de famille, les fortunes se trouvent en fait réduites de moitié. Le millionnaire d’il y a vingt-cinq ans avait 50 000 livres de rente ; il n’en a plus que 25 000 à l’heure actuelle. Parallèlement, les taux d’escompte ont baissé jusqu’à être souvent inférieurs à 1 pour 100 à Londres, à 2 pour 100 à Paris et à 3 pour 100 à Berlin. Les sociétés financières ne peuvent donc plus compter sur le jeu naturel de la banque, c’est-à-dire l’écart entre l’intérêt bonifié aux déposans et celui qui est obtenu par l’escompte du papier ou les avances sur titres pour rémunérer leurs capitaux, à moins de se contenter d’un rendement tellement inférieur, que le travail lui-même, en ce cas, ne reçoit plus sa récompense légitime. Dès lors, les financiers se sont trouvés poussés à rechercher des sources de profils sinon aussi réguliers, du moins plus forts, et ils ont de plus en plus porté leur attention du côté des valeurs industrielles.

Cela ne veut pas dire que les établissemens de crédit d’outre-Rhin aient renoncé à leur devoir professionnel par excellence, celui de recevoir les dépôts d’argent du public, de lui allouer un intérêt et de faire son service de caisse. Les trente principales banques mobilières par actions, qui accusaient en 1896 un capital d’environ 1 600 millions de francs en tenant compte de leurs réserves, 1 700 millions de dépôts et de comptes courans créditeurs, 800 millions d’acceptations en cours, avaient un portefeuille d’escompte