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la crue de 1876. À cette époque, la plaine de Gennevilliers et celle d’Achères furent couvertes par les eaux ; les terrains bas compris entre l’Eure et le fleuve formèrent une véritable mer de 22 kilomètres carrés de surface. Les pertes des particuliers se chiffrèrent par millions, et l’État eut des réparations importantes à faire à de nombreux ouvrages d’art.

Or, les coupures faites dans les boucles d’Argenteuil-Sartrouville et de Tourville-Oissel, pour le passage du canal, fourniront une double évacuation aux eaux, ce qui en abaissera le niveau. En tenant compte à la fois des remous causés par les débouchés insuffisans des ponts, de celui causé par les sinuosités du fleuve, on calcule que l’abaissement du plan des eaux, pour une crue de l’importance de celle de 1876, serait de 1m,51 à Poses et de 2m,33 à Poissy. Les trois grandes plaines précitées resteraient exondées[1].

A côté de ces avantages, il en est d’autres que nous ne devons pas oublier. Le commandant Lamé, dans une lettre, les colonels Foury et Hennebert, dans des brochures, ont insisté sur l’utilité, en temps de guerre, d’un canal maritime reliant Paris à Rouen. Ces avis, émanant d’officiers du génie, et appuyés par une série de faits et d’exemples, ont une grande valeur, mais elle est accrue par l’opinion d’un général dont le nom fait autorité dans toute l’Europe.

Nous transcrivons ici sa lettre au colonel Hennebert.


« Mon cher colonel,

« Des travaux qui auraient pour résultat de rectifier et d’approfondir la Seine entre Paris et Rouen seraient incontestablement utiles pour faciliter et pour accélérer l’approvisionnement de votre grande place de guerre avant l’arrivée de l’ennemi.

« Le seraient-ils encore de même après l’investissement de cette place ?

« Je n’hésite pas à répondre oui, si l’entrée du fleuve reste libre ; si les écluses de Méricourt et de Poses sont protégées chacune par un fort permanent ; et si Rouen est défendu par des travaux analogues à ceux que l’on avait résolu de construire en 1870.

  1. Nous pouvons dire ici que les chutes d’eau de chaque barrage restent inutilisées, le fleuve s’écoule entre les fermettes qui le surélèvent. Il en serait autrement s’il était entre les mains d’une société commerciale.