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Et on pourrait enfin, — comme l’ont fait à l’occasion de l’affaire Dubout quelques-uns de nos confrères, comme l’a fait lui-même l’avocat de M. Dubout, — on pourrait dire de fort belles choses sur la critique en général, sur ses droits, sur les services qu’elle a rendus, qu’elle nous rend tous les jours encore, et dont le moindre n’est certes pas d’avoir assuré depuis quatre cents ans la continuité de la littérature française. Seule ou presque seule de toutes les grandes littératures modernes, si la littérature française a ce que l’on appelle une histoire suivie ; si la succession des grandes époques y est à peine interrompue, de loin en loin, par quelques périodes plus pauvres ; et si la régularité même de cette succession n’a pas laissé d’aider au développement des meilleures qualités de l’esprit français, il y aurait plaisir à faire voir que l’honneur en revient pour une grande part à la critique. Interrogez plutôt à cet égard les Anglais, les Italiens, les Allemands, et, de nos jours mêmes, entendez-les regretter l’insuffisance de la critique dans leurs littératures…

Mais, insister sur tous ces points, ce serait donner le change, ou le prendre soi-même sur la vraie question, qui n’est que de savoir ce que l’on doit entendre par « le droit de réponse » ; et si la jurisprudence, en lui donnant l’étendue de portée qu’elle lui donne, ne s’est peut-être pas méprise, ne se méprend pas systématiquement au vrai sens de l’expression. Simple question de sémantique ! dirait ici notre éminent confrère, M. Bréal.

On a invoqué de grands mots à ce sujet, et on a fait des phrases retentissantes. On a parlé de la « tyrannie » de la critique ? et on lui a demandé de quelle origine souveraine elle tenait son investiture ? Quelques-uns même ont raisonné comme si la critique exigeait qu’on fit silence après qu’elle a parlé ; comme si nous demandions qu’on