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VII

La présente étude ne pouvait s’étendre à chacune des industries allemandes : il y faudrait une encyclopédie. Celles que nous avons choisies donnent une idée suffisante de la remarquable expansion de nos voisins. Celle-ci inquiète les Anglais au point qu’ils commencent à établir eux-mêmes en Allemagne des fabriques qui fassent concurrence aux établissemens indigènes similaires. On assure qu’un des principaux fabricans de machines de Leeds va transporter de l’autre côté de la mer du Nord son activité principale. Un constructeur de moteurs à Coventry, un des plus grands producteurs de savon de la Grande-Bretagne, songeraient à établir à Rheinau d’importantes succursales. Une fabrique de produits chimiques, projetée d’abord à Londres, se construirait aussi à Rheinau.

Un prochain travail montrera aux lecteurs de la Revue le développement parallèle du commerce, cet auxiliaire indispensable ou plutôt cet allié inséparable de l’industrie. Mais il est utile de faire ressortir dès aujourd’hui les dispositions des industriels au point de vue du régime douanier et des traités de commerce. Il est évident qu’une généralisation est ici difficile : bien que le progrès soit à peu près la règle dans toutes les branches, il n’est pas égal partout. Les dispositions des fabricans de produits chimiques et particulièrement de couleurs artificielles, qui exportent une valeur de 80 millions de francs par an, c’est-à-dire les quatre cinquièmes de leur production, sont devenues plus libérales, tandis que les filateurs et les métallurgistes croient avoir beaucoup plus à redouter de la concurrence étrangère. On remarque cependant que l’ensemble des industriels est revenu des idées de protection sans limites qui dominèrent un moment la politique commerciale allemande, et tend à se rallier au régime des traités de commerce inauguré depuis quelques années. La dénonciation récente du traité anglo-allemand par la Grande-Bretagne a inquiété et non réjoui. Chacun sent qu’à une production croissante il faut de nouveaux débouchés, et que c’est au dehors qu’ils doivent se trouver.

Cette nécessité de vendre au delà des frontières une partie de ce qui se produit sur le territoire national inquiète une certaine école, qui déplore l’évolution en vertu de laquelle l’Allemagne