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LA GUERRE HISPANO-AMÉRICAINE
ET LE DROIT DES GENS

Au tribunal de l’opinion publique, une guerre est juste quand elle est déterminée par une cause légitime ou, pour emprunter l’expression même de Grotius, « lorsqu’elle est entreprise pour obtenir justice ». Mais les Romains donnaient le plus souvent un autre sens aux mots bellum justum : une juste guerre était encore, à leurs yeux, celle qu’on avait déclarée régulièrement et dans le cours de laquelle les lois de la guerre étaient observées. M. Phelps, — ancien ministre des États-Unis à Londres, — s’est naguère proposé, dans une lettre remarquable, adressée à l’honorable Levi P. Morton, sous ce titre : L’intervention des États-Unis à Cuba, d’étudier au premier point de vue la légitimité de la guerre hispano-américaine.

Nous n’avons pas à rentrer dans cette discussion. Mais on s’est un peu moins pressé d’étudier la question sous cette autre face : les lois de la guerre sont-elles observées ? Sur ce terrain, la politique cède la place au droit international. Une mauvaise cause peut être défendue par des moyens juridiques, comme une bonne cause peut être défendue par de mauvais moyens. Cette étude est un peu plus technique et plus ardue, mais non moins utile. Peut-être même intéresse-t-elle un plus grand nombre de gens. En effet, les pays neutres, c’est-à-dire tous les pays du monde autres que les États-Unis et l’Espagne ont besoin de savoir jusqu’à quel point les opérations de leur commerce peuvent être paralysées par les belligérans, et par suite de connaître l’étendue de leurs droits et de leurs devoirs.