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gaz ; » nous disons « l’argon ; » mais ce pourrait être tout aussi bien un mélange de plusieurs gaz au lieu d’un gaz unique ; et c’est, en effet, ainsi.

Avant de l’avoir isolé en nature, on savait d’avance que l’argon devait posséder, d’entrée de jeu, deux caractères : il devait être plus pesant que l’azote et plus inactif que lui. Inactif, il fallait bien qu’il le fût pour résister aux agens qui absorbent les autres constituans de l’air, oxygène, acide carbonique, vapeur d’eau, etc., et pour subsister dans ce mélange résiduel si longtemps appelé l’azote atmosphérique. Mais il devait être plus inactif encore que l’azote puisque l’on connaît des circonstances où l’azote de l’air entre en combinaison et forme des composés où sûrement il n’est pas accompagné d’argon. C’est sur cette remarque qu’est fondée sa préparation.

Préparation. — Après avoir absorbé les constituans banals de l’air atmosphérique par les réactifs appropriés et bien connus, il s’agit d’enlever l’azote à son tour. On a pour cela le choix entre deux procédés : celui de Cavendish, qui consiste à le combiner à l’oxygène ; celui de W. Ramsay, qui consiste à le combiner au magnésium. L’un et l’autre sont laborieux, presque au même degré, et de maigre rendement. On s’est efforcé de les perfectionner.

En ce qui concerne le procédé de Cavendish, lord Rayleigh est parvenu à lui faire rendre 7 à 8 litres d’argon à l’heure ; c’est presque la production en grand. L’opération nécessite l’emploi d’un courant électrique puissant, courant alternatif de 100 volts, amené par le transformateur Hedgehog à la tension de 2 400 volts ; l’étincelle éclate entre deux fortes tiges de platine au milieu de l’air contenu dans un grand ballon de 6 à 7 litres ; la solution de soude caustique est projetée en pluie fine qui ruisselle constamment le long des parois, absorbant, grâce à ce contact multiplié, les vapeurs nitreuses aussitôt qu’elles sont formées, et évitant à l’appareil réchauffement considérable que les décharges ininterrompues ne manqueraient pas de produire. C’est un double avantage.

Le procédé au magnésium n’exige pas un outillage aussi compliqué ; mais il est plus laborieux et plus lent. La limaille métallique est disposée dans un de ces tubes en verre vert peu fusible, que les chimistes utilisent pour les analyses organiques et que l’on chauffe sur la grille à gaz. Un courant d’azote